Entre le phénomène El Nino et le réchauffement climatique, une sécheresse sévère frappe toujours plusieurs régions de la Bolivie et du Brésil. Des incendies immenses ravagent l’Amazonie. Au total, rien qu’en Bolivie, près de 4 millions d’hectares ont été détruits par les flammes, provoquant une forte dégradation de la qualité de l’air dans de nombreuses villes. Pour faire face à cette situation, le gouvernement a déclaré l’urgence nationale afin de faciliter l’arrivée de l’aide internationale.
Les fumées des incendies en Amazonie atteignaient, lundi, environ 60 % du territoire brésilien mais aussi l’Argentine et l’Uruguay voisins. Les autorités sanitaires font état d’une forte augmentation des cas de personnes souffrant de problèmes respiratoires, crises d’asthme, pneumonies ou sinusites.
Ainsi de Rio à Buenos Aires en passant par Lima, Santiago et La Paz les incendies continuent de faire des ravages dans l’une des plus grandes zones forestières du Monde, l’Amazonie mais c’est en Bolivie que les choses sont plus sérieuses et il aura fallu des semaines de brasiers et de zones agricoles et forestières dévastées. Le gouvernement bolivien décrète enfin, dimanche 8 septembre, « l’urgence nationale », pressé de toutes parts de passer à l’action contre des incendies qui ravagent l’est du pays. Cette décision va permettre notamment de faciliter l’arrivée de l’aide internationale dans le pays, où des pompiers français devraient participer.
Selon nos confrères de France TV info, les feux gigantesques ont sévi en fin d’année dernière déjà, comme en 2019 et 2021. Revoilà depuis quelques semaines les mêmes images de paysages et de villes enfumés où il semble faire nuit en pleine journée, et ces incendies ont bien sûr des conséquences lourdes, avec des activités à l’arrêt (aéroports ou écoles fermés) et des zones agricoles dévastées. Au total, près de quatre millions d’hectares ont brûlé en Bolivie, et la répétition de ces événements d’ampleur est en partie liée à la déforestation qui s’accentue dans le pays.
Mais l’annonce arrive bien tardivement pour la sénatrice d’opposition Cecilia Requena, spécialisée sur les questions d’environnement. « C’est une tragédie sanitaire, environnementale, économique et sociale. Qu’attendait le gouvernement ? Car il est évident que les autres mesures n’étaient pas suffisantes », a-t-elle tancé.
Deux régions déclarées en état de catastrophe naturelle
En plus de l’urgence nationale, déjà deux régions se sont déclarées en état de catastrophe naturelle à cause des feux. Et comme l’explique la sénatrice, la saison des incendies est loin d’être terminée. « Nous sommes à peine en septembre. Les incendies pourraient continuer jusqu’en décembre, comme l’année dernière. Il n’y avait pas eu de pluie et cette année, il n’y en a pas non plus à cause des incendies. C’est de pire en pire ! », s’est exclamé Cecilia Requena.
L’état d’urgence national va faciliter l’arrivée d’aide internationale. Ainsi, 60 pompiers brésiliens sont déjà arrivés pour aider à lutter contre ces incendies. Ils devraient être rejoints dans les prochains jours par des pompiers français, chiliens et vénézuéliens.
Le Brésil aussi impacté :
Le Brésil a également été confronté à des incendies importants dans ses villes, et la forêt amazonienne connaît son pire début depuis deux décennies après une sécheresse record. Malgré la résistance des communautés, les incendies ont ravagé les territoires autochtones et les zones protégées de l’Amazonie bolivienne. Ces incendies ont perturbé les sources alimentaires, l’accès à l’eau potable et détruit des maisons. Le problème va au-delà du changement climatique pour toucher des questions structurelles : les politiques nationales favorisent les économies extractives. Les communautés savent que les incendies seront utilisés comme prétexte pour empiéter sur leurs terres.
Face à l’ampleur des incendies, selon Inpe, l’agence brésilienne de recherche spatiale qui suit les incendies, la Bolivie a connu le plus grand nombre d’incendies de forêt depuis 2010, avec au moins 3 millions d’hectares brûlés cette année. L’Amérique du Sud traverse actuellement sa saison de feux de forêt maximale, qui s’étend d’août à septembre, après une saison de feux inhabituelle ayant commencé en juillet en raison d’une sécheresse.
Cependant, c’est l’année 2019, la Bolivie a connu ses plus grands incendies de forêt enregistrés, affectant plus de 6 000 000 d’hectares dans l’est de la Bolivie, principalement dans la forêt sèche de Chiquitano de Santa Cruz. Cette année-là, il y a eu un débat significatif sur le « paquet de normes incendiaires », un ensemble de lois et décrets de 2013 à 2019 favorisant la déforestation et assouplissant les permis pour l’agriculture sur brûlis. Le « paquet de normes incendiaires » est considéré comme un facteur clé des incendies de forêt annuels du pays.
Les ressources de lutte contre les incendies en Bolivie sont surchargées, poussant le gouvernement à rechercher une aide internationale. Les volontaires autochtones ont tenté de protéger leurs terres, utilisées pour la culture des aliments et l’alimentation du bétail près de la forêt de Chiquitano qui s’étend vers le Brésil et le Paraguay, mais certains ont dû évacuer.
En 2020, les changements apportés au Plan d’utilisation des terres de Beni (PLUS) ont mis en évidence les efforts de certains secteurs pour légaliser la déforestation et modifier les catégories de terres pour étendre l’élevage et l’agriculture de monoculture. Depuis l’approbation du PLUS à Beni, il y a eu une augmentation des foyers d’incendie dans le département.
Déforestation atteignant des niveaux alarmants en Bolivie
Selon le site NewsX, le changement climatique est devenu une réalité indéniable. En octobre, des températures exceptionnellement élevées ont été enregistrées par le Service national de météorologie et d’hydrologie dans au moins cinq départements. En octobre de l’année dernière, environ 105 municipalités en Bolivie avaient déclaré une catastrophe en raison de la pluie insuffisante. La combinaison de températures élevées et de sécheresse a entraîné la perte des cultures agricoles dans les communautés autochtones et a rendu les forêts extrêmement susceptibles aux incendies. La technique traditionnelle de brûlis, autrefois gérable, a conduit à des incendies sans précédent dans les provinces d’Abel Iturralde et de José Ballivián durant cette période.
Dans cette crise climatique, il est crucial de remettre en question les normes nationales et les politiques qui favorisent les économies extractives liées aux incendies forestiers. En 2022, la Bolivie était le troisième pays en termes de déforestation des forêts primaires tropicales au niveau mondial. L’exploitation aurifère alluviale a augmenté dans l’Amazonie bolivienne, entraînant la déforestation par des activités illégales, des modifications des cours d’eau et une pollution au mercure.
En 2022, la Bolivie a perdu 245 177 hectares de forêt primaire, représentant 12,4 % de la déforestation totale de l’Amazonie cette année-là. Les territoires combinés de l’Amazonie de la Colombie et du Pérou, totalisant environ 127 millions d’hectares, ont représenté seulement 12,2 %, selon le Monitoring of the Andean Amazon Project (MAAP), un réseau axé sur le suivi de la déforestation dans la région. Autre information et non des moindres, entre 2002 et 2023, plus de 4 millions d’hectares de forêt primaire—équivalents à la taille de la Suisse—ont été perdus, selon Global Forest Watch. Cela représente une réduction de 10 % de la couverture forestière primaire depuis le début des années 2000. La déforestation récente est principalement due à des incendies incontrôlés. Ces incendies causés par l’homme, destinés à défricher des terres pour l’agriculture par une pratique connue sous le nom de « chaqueo », deviennent souvent des incendies de grande envergure. De nombreux incendies sont illégaux et deviennent incontrôlables, détruisant de grandes zones de forêt.
Ces incendies, pour la plupart d’origine criminelle selon les autorités, et souvent liés à l’activité agricole, se propagent plus facilement en raison d’une sécheresse historique causée notamment par le réchauffement climatique, d’après les experts.