C’est historique, l’Eglise Catholique a officiellement demandé pardon pour l’esclavage et le colonialisme mais aussi pour avoir pris part à la mondialisation de l’indifférence face aux tragédies. Des excuses qui ont été formulées lors de la session du synode sur la réforme de Gouvernance de l’Église catholique a débuté sur un repenti de l’institution qui a présenté 7 nouveaux péchés durant de la célébration pénitentielle du 1er octobre en la basilique Saint-Pierre à Rome.
Depuis qu’il est à la tête de la plus grande institution religieuse au Monde, le Pape François tente malgré tout de redorer l’image de l’Eglise qui a été entachée ces dernières décennies par de nombreux scandales, sexuels envers des enfants mais aussi des femmes à travers le Monde ainsi que des accusations de violences envers les autochtones du Canada, du Brésil, d’Australie mais surtout d’avoir couvert les auteurs ou autrices de ces crimes abominables. Des hommes qui avaient pourtant fait le vœu de piéter, de chasteté et de toujours respecter à la cause humaine. D’autre part, le souverain Pontife a à plusieurs reprises pris positions contre les guerres actuelles, contre l’exploitation de l’homme par l’homme et contre les positions néolibérales qui ont lieu. Un Pape qui a compris les enjeux mondiaux actuels et donc qui vit avec son temps.
Après une première session d’une durée d’un mois, en octobre 2023, qui avait soulevé de vives controverses dans l’Église – notamment sur la place des femmes, sur le célibat sacerdotal et sur le pouvoir de l’évêque -, cette assemblée romaine reprend ses travaux ce mercredi pour quatre semaines. Elle est composée de 386 membres, dont 96 évêques, 53 femmes et 41 laïcs. À son terme, ils proposeront, le 26 octobre, des réformes qui seront transmises au pape. Lui seul décidera, dans le courant de l’année 2025, ce qu’il en retiendra.
Ce synode novateur a été introduit, mardi soir, par un événement singulier dans la basilique Saint-Pierre de Rome : une « demande de pardon » pour une série de sept péchés inédits dans la tradition catholique. Pour en expliquer le sens, sept cardinaux ont lu des textes d’explication que le pape avait lui même rédigés. Il est question de guerres, de destruction de l’environnement, mais aussi de maux dans lesquels la responsabilité de l’institution est directement mise en jeu. Contre toutes attentes, parmi les excuses formulées par les représentants de l’Eglise Romaine, il y a en a eu pour l’esclavage et la colonisation mais pas puisque les cardinaux ont également évoqué l’oppression des femmes et bien sûr les abus sexuels, aspect structurel de la crise de l’Eglise à laquelle le synode doit répondre.
Ainsi les sept péchés définis par l’Eglise on retrouve le péché contre la paix, le péché contre la création, contre les peuples indigènes, contre les migrants, le péché d’abus, le péché contre les femmes, la famille, les jeunes, le péché de la doctrine utilisé comme des pierres à jeter, le péché contre la pauvreté et le péché contre la synodalité, le manque d’écoute, de communes et de participation de tous.
C’est lors de la lecture sur le péché contre les peuples indigènes par le cardinal d’origine tchèque Michael Czerny, que le pardon contre l’esclavage a été demandé :
Nous n’avons pas reconnu le droit à la dignité de chaque personne humaine, en la discriminant et en l’exploitant – Je pense en particulier aux peuples indigènes – et pour les moments où nous avons été complice de systèmes qui ont favorisé l’esclavage et le colonialisme ».
En ce qui concerne le péché contre les femmes, c’est le Cardinal Joseph Farell qui a pris la parole
Je demande pardon au nom de toute l’Église, en particulier de nous, les hommes, en ayant honte de toutes les fois où nous n’avons pas reconnu et défendu la dignité des femmes, où nous les avons rendues muettes et soumises et bien souvent exploitées, en particulier dans la condition de la vie consacrée.
D’ailleurs, le chef de l’Eglise s’est exprimé en premier où il a posé une question claire :
« Comment pourrions-nous être crédibles dans notre mission si nous ne reconnaissons pas nos erreurs et si nous ne nous penchons pas pour soigner les blessures que nous avons provoquées avec nos péchés ? »
Ces excuses sont historiques et cela à le mérite d’être dit car quand on connait l’histoire de ce qu’ont été l’esclavage et la traite négrière en période coloniale et la colonisation qui les a succédé et la part active des Eglises Catholiques et Protestantes dans ces crimes, ils étaient des millions ( pas seulement en Afrique ou aux Amériques) à les attendre. Les prêtes à travers l’Eglise ont pris une part active dans le commerce triangulaire. En effet, quarante ans après le débarquement de Christophe Colomb, le pape interdit ainsi l’esclavage des Amérindiens bien qu’ils n’appartiennent pas à la chrétienté. L’Eglise considère que ceux-ci, soumis à la domination de rois chrétiens, sont en voie d’évangélisation. Il en va différemment pour les populations d’Afrique subsaharienne qui sont païennes et vivent dans des Etats indépendants. Même convertis après leur déportation en Amérique, les théologiens considèrent que, dans la mesure où ils ont été acquis légalement comme esclaves sur les côtes d’Afrique, la traite et la servitude sont légitimes. D’ailleurs, les prêtres étaient bien présents dans les comptoirs négriers où étaient acheminés les captifs africains avant la traversée de l’Atlantique. Ils étaient également là sur les navires négriers qui transportaient les esclaves vers le Nouveau Monde. Dans ces nouvelles terres, l’Eglise était déjà bien implantée et c’est elle qui baptisait les bossales ( noms des esclaves qui avaient été transportées de l’Afrique aux Amériques.)
Durant cette période noire de l’Histoire Humaine, l’Eglise a clairement béni ce commerce odieux, le justifiant sur la couleur de la peau de l’individu mis en esclavage et se basant sur la fameuse malédiction de Cham, fils de Noé. Ce dernier aurait ainsi condamné tous les descendants de Cham – considérés comme africains, ce que ne dit pas la Bible à la servitude éternelle. Quand la question d’abolir l’esclavage est apparue et a fait son long cheminement, jamais l’Eglise ne s’est positionnée. Si certains de ses membres se sont opposés à l’esclavage, ce n’est qu’à titre individuel en revendiquant les valeurs évangéliques et sans engager l’Eglise. A la fin de l’esclavage, c’est cette même Eglise qui donnera son approbation aux régimes coloniaux pour s’accaparer la totalité de l’Afrique ( sauf l’Ethiopie jamais colonisée.) afin d’évangéliser les peuples de ces royaumes millénaires. Il faut le dire, ce sont les missionnaires qui ont été les premiers colons en Afrique. Leur présence dans ces contrées lointaines a favorisé l’implantation de nouveaux colons venus pour des raisons économiques. Dans ces territoires sous domination des puissances occidentales, ils ont tenu des écoles, des orphelinats en Afrique mais aussi aux Amériques, en Australie. Des prêtres ont usé de leur pouvoir pour violer, torturer des générations d’enfants, de femmes et mêmes des hommes. L’Eglise a donc été une complice active de l’aliénation et de l’asservissement des différents peuples vaincus et soumis.
Bien que tardives, ces excuses sont les bienvenues car, il était temps.