En juillet 2022, lors de la fête du petit village de Verzeille, un homme d’origine guadeloupéenne a été passé à tabac. La scène a été filmée. Lynchage collectif raciste ou bagarre alcoolisée massive ? C’est tout l’enjeu du procès qui s’ouvre ce 4 septembre à Carcassonne. Par ailleurs, alors que trois hommes étaient initialement inquiétés, ils seront finalement quatre convoqués à la barre, dont un élu.
En début d’année 2024, trois hommes auraient dû être jugés dans l’affaire du lynchage collectif d’un homme d’origine guadeloupéenne et d’un autre d’origine mahoraise, survenue le 24 juillet 2022 à Verzeille, mais le tribunal correctionnel de Carcassonne en avait décidé autrement. Le procès avait été renvoyé au mercredi 4 septembre au palais de justice de Carcassonne.
Tout a commencé le 24 juillet 2022, la fête du village de Verzeille dérape violemment. L’alcool coule et les coups pleuvent. Deux hommes, l’un d’origine guadeloupéenne, l’autre d’origine mahoraise sont accusés d’avoir piqué des fêtards. Les deux victimes sont gazées et tabassées par une quinzaine de personnes. Sur une vidéo publiée sur les réseaux sociaux et supprimée depuis, Hans – l’une des victimes – reçoit au moins une vingtaine de coups de poing et de pieds au visage. Dans ces images filmées par un habitant sur place, on entend : « Tuez-le ! « . L’agression faisait suite à une suspicion collective, des fêtards pensaient avoir été victimes de piqures.
Après ce lynchage collectif, Hans s’est vu prescrire six jours d’ITT (incapacité totale de travail) et plus d’un mois d’arrêt de travail. Entendu par la gendarmerie de Limoux où il a déposé plainte, il dénonçait à l’époque « une agression à caractère raciste ». Cependant, les circonstances aggravantes tenant au caractère racial n’ont pas été retenues par le parquet de Carcassonne. Les personnes mises en cause devront être jugées pour « violences en réunion » suivies d’ITT n’excédant pas huit jours.
La fédération Nationale des Maison des Potes est partie civile dans ce dossier, c’est un réseau qui lutte contre les discriminations. Elle voit dans cette affaire les marques d’un racisme libéré dans la société française. Son président Samuel Thomas s’insurge : « Que les gens fassent des psychoses de piqures imaginaires c’est déjà grave, mais en plus qu’après ils mettent ça sur le dos du noir, c’est à dire l’étranger visiblement noir qui vient dans un village ça doit être lui qui est à l’origine de ces piqûres imaginaires, ça démontre qu’il y a des relents racistes dignes des Etats-Unis des années du Ku Klux Klan. »
De son côté, Me Coney, l’avocat de Hans a obtenu de pouvoir soulever cette question, demain, devant le tribunal correctionnel, avec l’espoir de convaincre la cour. Pour Maître Coney, qui, en plus de Hans, représente aussi l’association Maison des potes, qui s’est également constituée partie civile, cet élément est essentiel pour qualifier les faits et ce dernier s’appuie, notamment, sur des témoignages, ainsi que la vidéo de l’agression diffusée sur les réseaux sociaux avec les mots prononcés : « C’est les Noirs et tuez-les ».
Par ailleurs, alors que trois hommes étaient initialement inquiétés, ils seront finalement quatre convoqués à la barre, dont un élu, quadragénaire très connu dans ce village de Verzeille, où avait eu lieu ce passage à tabac collectif, basé uniquement sur la rumeur infondée d’injection de stupéfiants par seringue.
Pour l’un des quatre avocats de la défense, celui de l’homme qui ce soir là se faisait passer pour un vigile, il s’agit d’une bagarre collective sur fond d’alcoolisation massive sans aucune distinction de couleur de peau. Maitre Aimé Diaka indique : « Il s’agit d’une bagarre collective dans une confusion sans nom et il se trouve que certains de ceux qui ont été pris à partie ont des origines différentes. Mais tous ceux qui ont été tabassés l’ont été, non pas parce qu’ils étaient africains ou de couleur noire, mais parce qu’ils étaient impliqués dans une bagarre collective. Ce n’est ni plus ni moins que ça.«
Une chose est sure, la reconnaissance ou non du caractère racial de ces violences jouera pour beaucoup dans la décision qui sera prononcée ce mercredi à Carcassonne.