Désormais, tout acte sexuel sans consentement sera considéré par la loi comme un viol ou une agression sexuelle. Le consentement, lui, est défini comme « libre et éclairé, spécifique, préalable et révocable ». Après un vote favorable de l’Assemblée nationale, le Sénat a adopté la réforme intégrant l’absence de consentement à l’article 222-22 du Code pénal. Le texte sera promulgué prochainement par le président de la République.
C’est une avancée majeure. Désormais, « tout acte sexuel non consenti » est désormais juridiquement considéré comme un viol ou une agression sexuelle. Le consentement sera lui aussi explicitement défini dans le droit comme étant « libre et éclairé, spécifique, préalable et révocable »
La proposition de loi, déposée le 21 janvier par les députées Véronique Riotton (Renaissance) et Marie-Charlotte Garin (Écologistes) modifie l’article 222-22 du Code pénal afin de définir l’ensemble des agressions sexuelles comme « tout acte sexuel non consenti ». « Le consentement est libre et éclairé, spécifique, préalable et révocable » et « ne peut être déduit du seul silence ou de la seule absence de réaction de la victime », prévoit le texte. La proposition de loi précise également qu’il n’y a « pas de consentement si l’acte sexuel est commis avec violence, contrainte, menace ou surprise quelle que soit la nature », reprenant ainsi la précédente définition du viol.
Quelques mois après le retentissant procès des viols de Mazan, durant lequel le consentement avait pris une place centrale, le droit pénal va donc être clarifié en comportant, noir sur blanc, cette notion, déjà omniprésente dans la jurisprudence.
C’est donc donc un texte pour « passer de la culture du viol à la culture du consentement », déclarait, jeudi 23 octobre, Aurore Bergé, la ministre chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes. Après l’Assemblée nationale, le Sénat a adopté, ce 29 octobre le texte modifiant la définition pénale du viol pour y intégrer l’absence de consentement comme un élément constitutif du viol.
La divergence entre les deux chambres portait sur la manière dont le juge devait apprécier l’existence ou non du consentement. L’Assemblée nationale souhaitait retenir la formulation « circonstances environnantes », tandis que le Sénat préférait le terme plus général de « contexte ».
« On avait vraiment un mot d’écart : nous voulions “contexte” et les députés “circonstances environnantes”. On considérait qu’“environnantes” était un terme flou », expliquait la sénatrice Dominique Vérien, présidente de la délégation aux droits des femmes et co-rapporteure de la proposition de loi au Sénat, à l’issue de la commission mixte paritaire.
De son côté, la députée Marie-Charlotte Garin jugeait la notion de « contexte » insuffisante. Finalement, les parlementaires ont trouvé un compromis autour du terme de « circonstances ».
La France rejoint ainsi les pays ayant déjà modifié leur législation en ce sens, parmi lesquels le Canada, la Suède, l’Espagne, ou encore la Norvège depuis le printemps 2025.
« Nous vivons depuis des siècles dans la culture du viol. Commençons à construire la culture du consentement », a plaidé la sénatrice (écologiste) des Français établis hors de France Mélanie Vogel : « Quand vous ne dites pas oui, c’est non. Quand vous dites oui parce que vous avez peur, c’est non (…). Le seul oui qui vaille est un oui libre. »
Une définition qui faisait débat
Si la réforme a été largement soutenue par les parlementaires, elle n’a pas échappé à certains débats au sein du monde juridique. Dans son avis du 6 mars 2025, le Conseil d’État a néanmoins estimé que cette modification permettait « de consolider, par des dispositions expresses et générales, les avancées de la jurisprudence ».
Lors d’une audition au Sénat, François Lavallière, premier vice-président du tribunal judiciaire de Rennes, avait souligné l’importance d’inscrire explicitement le consentement dans la définition du viol. Selon lui, « prouver l’élément intentionnel » de l’infraction reste « la partie la plus difficile ». « S’il n’est pas possible de démontrer l’intention, il n’y a pas de condamnation », rappelait-il.
Principal apport de cette nouvelle définition : le silence d’une victime ne pourra plus être interprété contre elle dans une affaire de viol ou d’agression sexuelle.
Seule l’extrême droite s’oppose au texte au Parlement : « Les avocats devront désormais disséquer non plus la violence du coupable, mais les gestes, les mots, le silence de la personne qui se déclare victime », selon la députée (Rassemblement national) des Pyrénées-Orientales Sophie Blanc.
Plusieurs sénateurs se sont par ailleurs abstenus, comme la socialiste Laurence Rossignol (Val-de-Marne), qui regrette le choix du mot « consentement », reflet selon elle d’une « vision archaïque de la sexualité dans laquelle les femmes cèdent ou se refusent ». « Consentir n’est pas vouloir », a-t-elle alerté sur X.
Face à ces doutes, certains parlementaires ont promis de mesurer prochainement les effets de cette évolution pénale sur la répression des violences sexuelles.
La Fédération nationale des centres d’information sur les droits des femmes et des familles a alerté sur la nécessité d’accompagner cette loi d’une « véritable éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle », et d’une formation des magistrats et des policiers et gendarmes.
« L’adoption de cette loi jouera un rôle crucial dans l’évolution des mentalités à l’égard du viol, mais elle ne fait pas non plus office de coup de baguette magique » pour « mettre un terme à l’impunité concernant les violences sexistes et sexuelles », a réagi Lola Schulmann, chargée de plaidoyer chez Amnesty International France.
source : Public Sénat

