Meddy “Lesage” Luit n’est pas seulement un champion : c’est l’un des visages majeurs du Jiu-Jitsu Fighting mondial. Originaire de la Guadeloupe, il s’est construit loin des projecteurs, entre humilité, discipline et une détermination hors du commun. Des tatamis locaux aux plus grandes compétitions internationales, il a gravi les échelons jusqu’à devenir l’un des combattants les plus respectés de sa génération. Portrait d’un sage guerrier.
Originaire de la Guadeloupe, Meddy Luit s’est construit loin des projecteurs, dans une discipline exigeante où rien ne s’improvise. Très tôt, il comprend que le Jiu-Jitsu Fighting ne se résume pas à la force brute. Il faut lire l’adversaire, anticiper, accepter le temps long. Cette approche, presque philosophique, forge son identité de combattant. Combat après combat, il affine son style, mêlant rigueur technique, intelligence tactique et sang-froid.
Derrière son calme presque déroutant, il impose le respect. Sur les tatamis, le combattant guadeloupéen n’élève jamais la voix, mais son Jiu-Jitsu Fighting parle pour lui. Précision, lucidité, maîtrise : chaque combat révèle un athlète qui a appris à gagner sans jamais se précipiter.
Son parcours est celui d’un athlète constant, travailleur, qui avance sans tapage mais avec une régularité impressionnante. Sur les compétitions nationales puis internationales, Meddy Lesage Luit s’impose progressivement comme une référence. Ses performances le placent parmi les combattants les plus respectés de sa catégorie, jusqu’à atteindre les sommets du Jiu-Jitsu Fighting mondial.
Mais au-delà des titres et des podiums, c’est l’homme qui marque. Il combat avec une forme de sagesse rare dans les sports de combat. Chaque victoire est mesurée, chaque défaite analysée. Il incarne une autre vision de la performance : celle d’un guerrier lucide, conscient que la discipline, la constance et l’humilité sont des armes aussi puissantes que la technique.
Aujourd’hui, Meddy Luit est bien plus qu’un champion. Il est un ambassadeur. Un visage du Jiu-Jitsu Fighting guadeloupéen et Français sur la scène mondiale. Un modèle pour une jeunesse qui cherche des repères, une preuve que l’excellence peut naître loin des centres traditionnels, à condition d’y mettre le travail, la patience et l’esprit juste.
Dans le silence des tatamis comme sous les projecteurs des grandes compétitions, le champion poursuit sa route avec la même sérénité et la même détermination.
Chez lui, la performance ne va jamais sans transmission. Le champion guadeloupéen ne combat pas uniquement pour lui-même, mais avec la conscience de ce qu’il représente. Transmettre, pour lui, ce n’est pas seulement enseigner des techniques, c’est partager une discipline de vie : le respect, la rigueur, le contrôle de soi. Sur et en dehors des tatamis, Meddy incarne cette idée que le Jiu-Jitsu Fighting est aussi une école de caractère.
Conscient de son rôle de modèle, il s’inscrit dans une démarche de passage de relais, attentive aux plus jeunes et à ceux qui débutent. Par l’exemple, par la pédagogie et par l’exigence, il montre qu’il est possible d’atteindre le haut niveau sans renier ses valeurs. Une transmission silencieuse, fidèle à son tempérament, mais essentielle pour faire grandir la discipline et inscrire durablement le Jiu-Jitsu Fighting guadeloupéen dans l’avenir.
Installés dans le cadre apaisé du Karukera Café, l’échange a permis de retracer son parcours, jalonné de combats décisifs, d’évoquer sa philosophie d’entraînement et sa façon de porter la Guadeloupe sur la scène internationale. Une trajectoire inspirante, façonnée par le travail, la résilience et une sagesse qui fait toute la différence.
Meddy Luit, bonsoir, c’est un plaisir pour moi de te recevoir dans notre concept “ Rencontre avec “ tourné au Karukera Café. Il est vrai que depuis plusieurs mois nous discutons à travers les réseaux sociaux et que nous parlons de faire une interview, c’est chose faite. Mais avant tout, qui es-tu ? Peux-tu te présenter à nos téléspectateurs et téléspectatrices ?
Meddy Lesage Luit : Bonjour, je suis Meddy Luit, je suis combattant de Jiu Jitsu Fighting, membre de l’équipe de France et je suis originaire de la Guadeloupe. J’étais prof d’EPS après j’ai été chef de service dans le médico-social. Actuellement, je travaille pour une collectivité, je travaille pour la commune de Saint-Ane. Au niveau de mes titres, il faut savoir que je suis double champion du monde en Jiu Jitsu Fighting, champion d’Europe et vice-champion du monde l’année dernière puisque j’ai perdu mon titre mais je compte le récupérer cette année. En ce qui concerne mes catégories, je combattais en moins de 94kg, j’étais monté en plus de 94kgs et là, pour ceux qui me connaissent, ils ont vu que j’ai commencé à perdre mes kilos pour redescendre en moins de 94 kgs.
Tu es originaire de la Guadeloupe. Peux-tu, nous raconter ton enfance, quelles sont les valeurs qui t’ont marqué ?
Meddy Luit : Mon enfance a été bercée entre Boissard, un quartier populaire qui n’existe plus mais il se situait entre les villes de Pointe-à-Pitre et des Abymes, ma tante y vivait et sinon Sainte-Anne, dans les Grands Fonds. Le quotidien, enfin le weekend c’était soit on était à Boissard ou soit éventuellement on sortait des Grands fonds et on allait à la plage du bourg de Sainte-Anne entre cousins. Tout ceci était ponctué de marches, de randonnées et sur la plage, on s’amusait à faire des combats entre nous, mais rien de bien méchant(rires). On jouait également au volley, football. Voilà à quoi s’articulait mon enfance.
Question, est-ce que Lesage est ton autre nom ?
Meddy Lesage Luit : Oh non (rires), c’est un surnom qui m’a été donné par des amis parce que comme je ne bois pas, je ne fume pas et lorsque j’étais en sélection régionale,jeje ne sortais pas trop de la chambre. À chaque fois, ils me disaient »Allez, viens, on y va. » Finalement, je préférais rester. Je me souviens, au CREPS et dans d’autres centres de formation, nous avions des chambres qui ne s’ouvraient que de l’intérieur, c’était à l’entraineur d’ouvrir mais de l’extérieur. Du coup, quand la personne sortait, elle ne pouvait plus entrer. Sauf, si on avait l’aval de quelqu’un et comme je ne bougeais pas trop de la chambre, je me chargeais de leur ouvrir.
Tu es champion de jiu jitsu fighting qui n’est pas un sport très connu en Guadeloupe et aux Antilles. On parle plutôt de judo. Comment est née ta passion pour le Jiu Jistu Japonais, d’ailleurs avant ça faisais-tu un autre sport ?
Meddy Lesage Luit : il faut savoir que j’ai commencé par le judo, que j’ai découvert en Guadeloupe. C’était pendant les grandes vacances, lors des sessions qu’ils appelaient “ Judo été” à l’époque. Donc, j’ai connu ce sport grâce à monsieur Laveau et monsieur Gigot Stéphane. J’ai débuté les entrainements avec eux, j’ai aimé, j’en ai fait jusqu’à l’université. J’ai été champion de France avec mon université Paris 12. C’est d’ailleurs à cette période que l’on m’a initié au Jiu Jitsu que je ne connaissais pas. Ils m’ont proposé de le pratiquer, j’ai accepté car, j’étais tombé amoureux de la discipline. Sachant que le Jiu Jitsu est pour moi, l’ancêtre du judo.
Ah bon ? Ce n’est pas le contraire ?
Meddy Luit : Pour la petite histoire, le Jiu Jitsu est l’art du Samouraï, quand ces guerriers n’avaient plus leur sabre, il savaient se battre à mains nues et au sol. Un homme, Jigorō Kanō qui est issu des écoles du Jit Jitsu au Japon, a enlevé tout ce qui était dangereux dans sa discipline, il a enlevé justement tous les atemis, tout ce qui était dangereux et il a créé le Judo. Ce qui fait que le Judo découle du Jiu Jitsu qui est l’ancêtre de beaucoup de sports de combat.
Tu as parlé de ton entrée dans le Jiu Jitsu mais est-ce que tu as grandi dans une famille de sportifs où tu es le seul à le faire professionnellement parlant ?
Meddy Luit : J’ai grandi dans une famille de sportifs, mais il faut savoir que elle était plutôt tournée vers le football. J’ai mon oncle qui était dans la sélection locale, mes cousins ont évolué dans le football, le vélo, un peu de boxe ou l’athlétisme et le handball. J’ai aussi un cousin du côté de ma mère qui était très bon en handball, il a joué en national mais les membres de ma famille n’étaient pas vraiment dans les arts martiaux.

A ce titre, peux-tu nous parler de ton sport le Jiu Jitsu d’où vient-il et quelles sont les différences avec le Judo que l’on connaît plus ici en Guadeloupe et en France ? Et quelles sont les différences entre jiu jitsu brésilien, jiu jitsu japonais et jiu jitsu fighting ?
Meddy Lesage Luit : le jiu jitsu fighting est composé de trois phases. C’est un peu comme le MMA ( Mixed Martial Art). La phase une, c’est le pied poing. La deuxième phase c’est tout ce qui est lutte et judo. La troisème phase concerne les soumissions au sol, comme du jiu jitsu brésilien et comme je disais précédemment au départ il y avait le jiu jitsu, Jigorō Kanō a enlevé tout ce qui était atemis il a créé le judo et il y a certains judokas, ils sont partis vers le Brésil où ils se sont perfectionnés au sol. Raison pour laquelle, comme je l’évoquais, j’ai intégré des éléments du Jiu Jitsu Brésilien. A ce propos, ici, en Guadeloupe,il y a un brésilien, Andoulo qui entraîne au gosier. Il y a également Charles Bucher qui un très bon entraîneur en en JJB. Tous deux sont de très bons pédagogues. Il y a aussi un club qui a ouvert sur Saint-François, le Yasuke.
On peut dire qu’il y a une expansion de ce sport chez nous et au national. Des judokas comme Teddy Riner vont prendre des cours de jiu jitsu brésilien parce que les fondateurs du JJB se sont spécialisés sur le combat au sol. En allant travailler le Jiu Jitsu, le judoka devient plus fort au sol. 70% des combats se finissent au sol et quand tu le pratiques, tu es sûr de remporter la victoire.
Qu’est-ce qui t’a poussé (ou inspiré) à finalement te consacrer qu’au ju-jitsu et quel âge avais-tu quand tu as décidé de le pratiquer sérieusement ?
Meddy Luit : Déjà au niveau du judo, j’avais déjà intégré les valeurs conscience du respect, le code moral. De plus, j’estime que le jiu jitsu et plus largement les armes martiaux ont pris l’ascendant, c’est devenu une philosophie, une manière de vivre. A mon humble avis, ce sont des choses qui sont transversales dans tous les lieux de vie. Que ce soit au travail, à la maison et dans le sport. Par ailleurs, j’ai un principe que je nomme les trois R. Respecte-toi, respecte autrui et respecte ton environnement. Une fois qu’on a ces trois principes de base, on vit dans un équilibre. Le Jiu Jitsu m’a fait rencontré des personnes des quatre coins du Monde. Il m’a permis de faire découvrir mon île, ma commune Sainte-Anne ainsi que la Caraïbe à l’étranger. J’ai des amis qui viennent de différents pays du Globe.
A un certain moment de ma vie où ça n’allait pas, le sport m’a apporté la sérénité et la confiance. J’ai vraiment pu décompresser.
As-tu des sportifs qui t’ont motivé et inspiré à poursuivre dans cette voie ?
Meddy Lesage Luit : effectivement, un nom me vient en tête. Percy Kunsa qui est venu plusieurs fois en Guadeloupe. Je l’ai fait venir…
Il est originaire d’où ?
Meddy Luit : Je crois qu’il est d’origine congolaise mais il est de nationalité Française. Il est membre de l’équipe de France Jiu Jitsu. Il a une carrière incroyable et inoxydable. Il a une longévité au niveau de son palmarès. Jusqu’à présent, il combat et il est même dans les trois premières places du classement. Malgré ses nombreuses victoires, c’est une personne extrêmement humble. Selon moi, il reflète les valeurs du Jiu Jitsu. Je suis un peu comme lui d’ailleurs. Je n’aime pas trop parler de moi. Je suis humble sur ma carrière. Tout comme lui, par la force des choses, je suis obligé de parler de moi pour aller chercher des sponsors pour soi, pour les élèves et puis parce qu’il faut que la discipline se fasse connaître à un plus large public. Qui plus est, vivant dans un archipel éloigné, nous n’avons pas forcément de continuité territoriale. Si les gens ne prennent par leur bâton de pèlerin pour aller chercher des partenaires, des médias pour faire connaître la discipline et puis pour qu’on puisse briller à l’international, rien ne se fera.
Ton palmarès professionnel est assez impressionnant, tu es membre de l’équipe de France de Jiu Jistu Fighting, tu as été vice champion du Monde en 2019, en 2022 tu deviens champions du Monde à Abu Dhabi, tu renouvelles l’exploit en 2023 en Mongolie, en 2024, tu es Champion d’Europe, très récemment tu es devenu Champion de Belgique, peux-tu revenir sur ces grands moments de ta carrière ?
Meddy Lesage Luit : Pour moi tous ces moments ont été importants honnêtement j’avoue que quand je suis avec l’équipe, on se transcende. Je peux dire qu’il y a des adversaires que je pense que je n’aurais jamais pu battre si je n’avais pas le soutien de l’équipe. Ensemble on se dépasse, on s’encourage. Sur le tatami, on combat pour soi et pour les autres. Même quand je suis en individuel. D’autre part, pendant l’année, j’ai répondu à des sollicitations de professeurs pour intervenir au sein de leurs classes en animant des ateliers. C’était magnifique. J’ai également travaillé avec la maison de protection de la famille qui est une cellule de la gendarmerie. on travaillait sur tout ce qui est canaliser la violence pour les jeunes.
Durant cette intervention, il y a un jeune qui m’a dit “ tu es mon idole.” Rien que ça, les mots sont forts. C’est pour ça que je dis que c’est un sport mais en fait on délivre un message et je sais qu’il y a du monde derrière et il y a des gens qui nous regardent, notamment cette jeunesse qui nous prend pour exemple. Donc c’est pour ça qu’on doit d’autant plus multiplier ses efforts de briller à l’international parce que je sais quand j’ai un sponsor qui investit euh pour mon billet, j’ai encore plus la pression à passer plusieurs tours lors des compétitions car, il faut que je lui montre une certaine reconnaissance et que je sois sur les feux des projecteurs comme on dit parce qu’il a misé sur moi. Sans lui, je ne serais jamais sorti de la Guadeloupe pour monter en Mongolie ou à Abu Dhabi. Ce n’est pas donné niveau financier. S’il y a pas de partenaires derrière, jamais je n’aurais pu le faire. C’est aussi pour cela que j’ai fait plusieurs appels à la Région Guadeloupe et aux hommes politiques pour que justement nos jeunes puissent pouvoir vivre ces moments que j’ai la chance de vivre. J’en profite pour remercier mes partenaires, les artisans ainsi que toutes les entreprises qui me font confiance car, je le dis, sans eux, rien n’aurait été réalisable. Quand je gagne, je deviens champion, ce n’est pas uniquement pour moi mais pour tout un groupe de personnes. J’en parle avec émotion, puisque sans ces personnes-là ça, je n’aurais pas pu aller là.
Quels sont les combattants qui t’ont le plus marqué qui ont été les plus difficiles à gagner ?
Meddy Luit : les combattants les plus marquants, sont les combattants des pays de l’Est.
Ils sont si bon que ça ?
Meddy Lesage luit : oui, ils sont même très bons. Les Russes, les Kazakhs etc ils sont physiques.
Mais leur sport n’est pas le Sambo alors ?
Meddy Luit : oui, depuis petits ils se battent dans la rue, ils font du Sambo. Ils sont très portés sur les arts martiaux. Il y a des pays où les jeunes vont faire du football, du basket mais eux ils font la bagarre tout le temps. Qui plus est, ils ont une forme de corps déjà prédisposée puisque depuis petits, ils sont ancrés dedans. A ce titre, je pense que l’on devrait nous aussi ancrer dans les arts martiaux dans les menus scolaires comme certains pays le font.
C’est vrai que tu dis ça mais dans les pays comme la Russie, l’Ukraine, les pays du Caucase tel que le Daghestan, tout ça, j’ai vu un reportage là-dessus et comme tu dis, depuis la maternelle, nous on nous entraîne au basket ou au football, eux ils font des sports de combat. C’est impressionnant quand même.
Meddy Luit : C’est aussi le cas des pays comme Abu Dhabi ou Dubai. Là-bas, ces sports sont déjà intégrés dans les écoles.Cela m’a étonné, lorsque je me suis rendu sur place, pendant le championnat du monde, il y a des écoles qui sont venues nous voir. En France, tu ne vois pas ça et je trouve ça impressionnant de voir que des écoles se déplacent pour voir les championnats du monde. C’est impression de savoir que le jiu jitsu est intégré dans leur culture. Si tu vas au Japon, tout le monde fait du judo. C’est quasi le sport national. Quand je me suis rendu sur place, je me rappelle que le professeur nous a fait nettoyer la salle où nous nous entrainions alors qu’il y avait des adsem, enfin des gens chargés de cette tâche. Alors que nous nous attelions à ce qu’il nous avait donné à faire, il leur a acheté du chocolat chaud et des croissants. Il avait raison, c’est notre environnement, ces dames n’ont pas à le faire à notre place. Il nous a fait nettoyer les tatamis. Selon moi, ce sont des valeurs qui doivent être ancrées et même véhiculées. Au Japon, il y a des jeunes qui font le nettoyage de leurs salles de classe ou de leur cour de récrée. Pour moi, si nous avons transmis ces notions à notre jeunesse, dès le début, il n’y aurait pas autant de perditions dans notre société.
C’est aussi pour cela que je dis que les arts martiaux sont une manière de vivre et c’est pour moi une évolution et même une émancipation.
Parmi tes victoires (monde, Europe, Open internationaux), laquelle a le plus de valeur pour toi et pourquoi ?
Meddy Lesage Luit : ce n’était même pas une fois où j’étais champion. Je pense que c’était peut-être en 2019 à Abu Dhabi.
Tu as perdu cette fois-là.
Meddy Luit : Oui. J’ai perdu en finale mais nous avons gagné en équipe. J’ai perdu en finale en individuel mais c’était toute l’atmosphère qu’il avait avec l’équipe de France et de savoir que nous sommes une famille et surtout que ça a été un des derniers moments où j’ai vu des frères d’armes qui depuis sont partis. Ce fut un moment fort justement avec certains d’entre eux.
Quand tu dis qu’ils sont partis, ils ont arrêté le sport ?
Meddy Luit : Non, ils sont décédés malheureusement. Mais bon, ce sont des choses qui arrivent. C’est la vie. Toutefois, pour moi, chaque victoire est un nouveau souvenir. Je fais de nouvelles rencontres, mais cette fois-là, je m’en souviens, il y a eu un problème d’entraineur. Si je m’en souviens bie, nous n’avions pas suffisamment d’entraineurs pour nous coacher et il y avait un collègue qui ne faisait pas forcément du jiu jitsu fighting. Il est spécialisé sol avec le Jiu Jitsu Brésilien. Pourtant, il s’est asssis sur la chaise de coach et il m’a guidé durant le combat, alors que ce n’était pas son domaine. Il a fait avec les moyens et les connaissances dont il disposait. Puis, nous sommes une famille, il fallait quelqu’un pour me soutenir, il y est allé. Il l’a très bien fait.

Le Jiu Jitsu est un sport physique que psychologique : comment travailles-tu ton mental avant un combat ?
Meddy Lesage Luit : Avec le temps, mon mental s’est renforcé. Puis, comme je te disais, j’ai beaucoup de monde derrière moi mais ça me pousse à me surpasser. Ensuite, le fait de savoir que l’on vient de loin met beaucoup de pression et je crois que c’est mon insularité j’ai voulu me surpasser et que je veux briller pour faire connaître justement ce petit papillon, cette petite Caraïbe et que je me suis surpasse quand je vais à l’international.
La discipline d’un sportif de haut niveau est exigeante. Comment organises-tu ta vie entre ton sport, ta vie personnelle, familiale et moments de repos ?
Meddy Luit : justement, c’est le problème quand tu es en Guadeloupe, c’est de trouver tout l’équilibre et d’avoir un employeur qui puisse te donner le temps de t’entraîner parce qu’il faut quand même comme tu dis un minimum d’entraînements dans certains pays les athlètes sont professionnels tandis que nous, ici, nous sommes semi professionnels; ce qui signifie que l’on doit travailler et en même temps s’entraîner et je t’avoue que c’est compliqué de trouver l’équilibre. A plusieurs reprises, j’ai été obligé de prendre des congés pour finaliser ma préparation, alors que je n’avais pas assez de temps et l’échéance arrivait. Donc c’est compliqué. Raison pour laquelle, je dis que si le sportif a un employeur qui est conciliant et qui sait que derrière c’est le blason de l’entreprise que tu représentes et plus largement du pays, il est conciliant, il fait des efforts pour te laisser pour t’entrainer, c’est positif pour les performances et les résultats.
Comme son nom l’indique, le Jiu Jitsu fighting est un sport de combat, quelles sont les réactions physiques et physiologiques du corps face à des coups répétés ?
Meddy Lesage Luit : Sans mentir, je n’ai jamais eu de réactions physiques importantes. Cependant, j’ai des collègues qui en ont eu notamment des cocards aux yeuux.
C’est si violent que ça ?
Meddy Luit : Oui et ce même si nous avons la mitaine. Le gant qui est coupé puisqu’en l’on doit pouvoir saisir au sol, tenir le kimono de l’adversaire mais entre deux prises, qu’on le veuille ou pas, il y a des coups, surtout sur la partie du torse. Après, nous sommes habitués et comme dirait un entraîneur “ la douleur est une information”, à force tu prends l’habitude et ça ne t’arrête pas.
En tant que combattant Jiu Jitsu, quelles sont les plus grandes qualités que tu t’efforces de développer, à la fois sur le ring et dans la vie ?
Meddy Luit : A vrai dire, je dirais un peu de tout. De toutes les manières, quand tu regardes bien quand tu travailles, il y a des règles à respecter notamment les horaires. Dans le cadre des arts martiaux, on dit qu’il y a une bien séance à avoir. Puis, comme je le disais, il faut se respecter mais surtout autrui ainsi que notre environnement. Une fois que tu as intégré ces valeurs tu n’as même pas à te poser la question de si tu le fais bien ou pas. Après, il est vrai que l’on peut faire des erreurs et pour y remédier, il faut t’appliquer, avoir plus de rigueur et redoubler d’efforts. Comme dans un entraînement, faire et refaire s’il le faut. A force, ça devient un automatisme et que tu arrives à la reproduire en compétition. Si je réponds bien à la question, je dirais donc, toujours se surpasser, s’améliorer et avoir du respect et ne pas abandonner.
As-tu une discipline en matière de nutrition, sommeil et récupération particulière que tu suis strictement ?
Meddy Lesage Luit : quand j’étais en en France Hexagonale, on avait quand même une équipe bien calibrée sur ces questions. Lorsque nous faisons des stages avec l’équipe de France, il y a le kiné, le nutritionniste. Tout est bien coordonné. Néanmoins, à mon avis, ce qui pourrait s’améliorer et c’est une idée que j’ai, c’est que toutes les ligues, pas que le judo-jiu jitsu, de la Guadeloupe puissent se fédérer se joignent pour créer un staff de suivi pour les sports parce selon les retours que j’ai, beaucoup disent que c’est qu’il manque. C’est vrai, que nous n’avons pas suffisamment de suivi à ce niveau. Il serait bien que toutes les fédérations de sport régionales s’unissent pour avoir un staff médical avec kiné etc et que ce ne soit pas juste lors des compétitions mais bien toute l’année avec un meilleur suivi des sportifs locaux. Peut-être que c’est un manque financier au niveau des ligues et des fédérations mais en étant ensemble, il pourrait vraiment y avoir des améliorations sur ce point. Il y a trop de jeunes qui ont un très bon niveau dans n’importe quel sport et ils ne sont pas assez suivis.
Du coup, selon toi, que faudrait-il faire pour renforcer le développement du jiu jitsu en Guadeloupe par rapport à l’Hexagone où il est un petit peu plus développé ?
Meddy Luit : honnêtement en Guadeloupe, nous avons de très bons pédagogues. Nous avons aussi de très bons élèves. Toutefois, comme je suggérais, sans doute, faudrait-il un partenariat avec des compagnies aériennes ou avec les différentes collectivités afin que nous puissions partir parce qu’en c’est en partant que l’on se développe. En allant à l’extérieur que l’on peut se confronter à d’autres et juger notre niveau. Il faut aussi faire des stages, des compétitions et ça demande beaucoup, surtout en terme financier. Bien que je sois fier de mon île, je le dis, même si on combat entre nous, c’est bien, il y a du bon niveau. D’ailleurs, il y a plein de jeunes qui ont du potentiel mais il manque l’argent pour qu’ils s’exportent et progresser. Si je parle du Jiu Jitsu, nous avons eu récemment, neuf ou dix jeunes combattants qui ont remporter des médailles qu’ils ont remporté au niveau européen ou mondial. Certes, j’ai été le premier Guadeloupéen à gagner dans la discipline, mais avant il y avait un Martiniquais monsieur César ou le Guadeloupéen David Pierre-Louis au niveau du Jiu Jitsu Brésilien et pionnier du sport chez nous, aujourd’hui il est entraineur de JJB, MMA et grappling. Aujourd’hui, je peux dire que la Guadeloupe est une plaque tournante des arts martiaux sauf qu’il manque les moyens de s’exporter.
Entendez Meddy Luit, soutenez le Jiu Jitsu.
Faire du sport de haut niveau coûte cher, entre les voyages, les entraînements, les équipements à acheter, est-ce que tu vis complètement de ça et est-ce que tu as des partenaires ( privés ou publics) qui t’accompagnent financièrement ? Et comment ça se passe ?
Meddy Lesage Luit : Je ne vais pas citer tous les citer, mais je vous dis merci. Il y a un proverbe créole qui dit sé gren di ri ka fè sak diri et c’est clairement le cas. Merci à ceux qui mettent leurs mains car sans eux, je n’aurais pas pu m’exporter et même faire des stages pour progresser parce que oui, en faire, ça coûte cher. Le jeune sportif qui débute qui est sélectionné pour aller en équipe de France, la ligue locale ne va pas le prendre en charge son déplacement pour aller au championnat de France. Ce sont ses parents et partenaires de trouver les fonds et si ce jeune n’a pas d’expériences, arrivé au championnat de France, il peut perdre au premier tour. Pour acquérir de l’expérience et de la maturité, il doit participer à des tournois dans l’année. Cependant, tout cela a un coup financier. Alors que comme je dis, c’est indispensable que le sportif puisse se confronter à d’autres athlètes et même qu’il découvre d’autres styles d’arbitrage qui diffèrent entre le régional, le national et l’international.
En parlant d’avenir, est-ce qu’il t’arrive de transmettre aux jeunes quand tu viens en Guadeloupe, est-ce important pour toi de transmettre à la nouvelle génération ?
Meddy Luit : oui, à moment de l’échange, j’évoquais mes interventions dans des écoles que j’essaie de faire régulièrement. J’interviens aussi avec la Maison de protection de la famille dans des ateliers sur la canalisation de la colère. Je suis également intervenant dans le champ du handicap. J’essaie de porter ma pierre à l’édifice car pour moi quand tu as un savoir, des compétences, il faut les transmettre. Ça ne sert à rien de tout garder pour soi.

Le Jiu Jistu est un sport mondial, pourtant en France mais surtout en Guadeloupe, il est assez récent, il y a bien moins de licenciés que pour le judo ou le karaté, penses-tu qu’il a de l’avenir chez nous ?
Meddy Lesage Luit : Si le judo est mis en avant c’est simplement parce qu’il est un sport olympique depuis plusieurs décennies. Par ailleurs, en France, en tant que combattant Jiu Jitsu Fighting, je dépends de deux fédérations celle du Judo à laquelle est rattachée la fédé de Jiu Jitsu. son essor, c’est la Fédération de judo. Il y a aussi la fédération de JJB. Dans d’autres pays, ces trois sports ont leur propre fédération. C’est pour ça que même cette année, ils ont fait en sorte que les adhérents prennent une licence judo et une licenceJiu Jitsu. Mais à un moment donné, je pense qu’il y aura une scission puisque le sport est en train d’émerger.
C’est vrai qu’avec le MMA, il se développe vu toute la hype autour de ce sport les organisations comme l’UFC.
Meddy Luit : oui, voilà ! En plus, tu as des combattants Français qui brillent comme Cyril Gane…
Ou Benoît Saint-Denis.
Meddy Lesage Luit : ils seront obligés à un moment donné de se séparer pour prendre leur essor, tout en continuant à travailler main dans la main parce que comme je le soulignais, pour moi, les arts martiaux sont comme un arbre avec la même racine mais chacun a ses branches. Ainsi, le MMA a besoin d’aller chercher dans le jiu jitsu brésilien,le judo puise dans le Jiu Jitsu et tu as le Jiu Jitsu Fighting qui est l’art du samouraï. Néanmoins, nous les combattants de Jiu Jitsu Fighting, nous avons besoin aussi du JJB. Quand tu vas au Brésil, les initiés du JJB font beaucoup de sol. D’ailleurs, en parlant du MMA, avant l’UFC, il y avait le Pride et celui-ci est né du vale tudo du Brésil et avant le vale-tudo, il y avait quoi ? Le Jiu Jitsu. Après ça s’est développé, la discipline est devenue plus complète. A ce propos, quand on regarde bien, auparavant, ceux qui dominaient le sport, c’étaient les Brésiliens. Ils venaient, raflaient tout…
Oui, mais ces dernières années, ce sont les combattants des pays de l’Est tel que le Daghestan, la Tchétchénie…
Meddy Luit : effectivement, depuis quelques années, les champions viennent de Russie,enfin des Républiques du Caucase, comme je l’évoquais, les Kazakhs. Ils sont très bons.
Ah oui ? Ils sont si bons que ça ?
Meddy Lesage Luit : Oui, ils sont très bons. Tout simplement, ils ont ancré leur politique nationale sur le sport et notamment le sambo, le jiu jitsu. Je me souviens lors d’un stage il y avait un des Kazakhs que j’ai rencontré en demi-finale je crois, il me montrait leurs séances d’entraînement qui n’ont rien à voir avec les nôtres. Ils s’entrainent très dur et en ce qui concerne la récupération, par exemple, nous, nous avons la cryo mais eux ils ont un lac glacé, dans lequel ils percent un trou et plongent dedans.
Ah ouai, ils sont hors normes !
Meddy Luit : ce sont de vrais guerriers. Quand on repense que tout est parti te disais au départ il y a les membres de la famille Gracie, et c’est eux qui ont justement mis en avant le jiu jitsu brésilien et ont jeté les premières bases du MMA moderne que nous connaissons. C’est pour te montrer que de toutes les manières, que ce soit au niveau du grappling parce que on dit jiu jitsu brésilien mais il y a le nogi qui est aussi du grappling mais en fait quand tu regardes le sambo, tu vois tout ça. Ces sports se ressemblent donc si on travaille ensemble, on progresse. Raison pour laquelle, quelqu’un qui fait des arts martiaux mais pluridisciplinaires, obligé d’aller chercher dans les spécificités des autres disciplines.
Quels objectifs sportifs te reste-t-il à atteindre en termes de titres, compétitions, défis personnels ?
Meddy Lesage Luit : Actuellement, je suis en train de redescendre en moins 94 kgs pour aller en championnat d’Europe, en début octobre. Début novembre, il y a les championnats du monde en Thaïlande. L’année prochaine, les gens vont voir mais je vais commencer les tournois de grappling, Logiquement, je vais faire du jiu jitsu brésilien, du jiu jitsu fighting et aussi des tournois de grappling. Je vais varier un petit peu au niveau des compétences et comme ça se complète, parfois tu fais le sport pour compléter ta discipline, toi-même tu te prends au jeu et tu fais des tournois et puis ça passe et puis après finalement ça passe crescendo que et puis tu te tu te retrouves dans deux voire trois disciplines.
Qu’aimerais qu’on retienne de ton parcours ( qui ne fait que progresser) ?
Meddy Luit : qu’est-ce que j’aurais aimé qu’on retienne ? Que le sport est important. Je ne sais pas. Après, pour moi,je n’ai même pass envie qu’on je ne sais pas s’il faut comme je dis, je n’aime pas trop parler de moi, l’amour du sport et comment dire le la solidarité que ça crée envers chacun, l’empathie, l’amour et le respect.
Une dernière question, où pouvons-nous suivre ton actualité ? Es-tu présent sur les réseaux sociaux ?
Meddy Lesage Luit : Oui, je suis présent sur les réseaux sociaux : meddy.luit sur Instagram. Je suis sur Facebook aussi et je viens de créer un compte TikTok.
Tu t’es mis à Tik tok ?
Meddy Luit : oui, je m’y suis mis car on me l’a conseillé. Après, je ne sais pas si je vais rester dessus. Mais, c’est vrai qu’il m’a été suggéré de poster des vidéos dessus.
En effet, ce serait bien pour les jeunes.
Meddy Lesage Luit : Oui, j’ai déjà commencé à poster mais je crois que je vais demander à tes collaborateurs à m’aider. (rires) parce que je ne suis pas très plateformes de réseaux sociaux mais sur Instagram ça va, je communique un peu plus.
Meddy Luit merci d’avoir pris de ton temps pour répondre à nos questions.
C’est moi qui vous remercie et peut-être que ça aura des répercussions sur les jeunes, car comme je le dis, la Guadeloupe est un vrai vivier et vous apportez votre pierre à l’édifice. Tout ce que je fais, je le fais pour la jeunesse, car je vais sur la pente descendante, eux, ils arrivent et ils vont tenir le flambeau et apporter les couleurs du pays.
C’est très beau ce que tu dis. Merci Meddy Luit.
Merci à vous.

