10 MAI 2001-10 Mai 2024 : il y a 23 ans l’esclavage entrait enfin dans l’histoire nationale.

En France, le 10 mai marque la commémoration officielle des mémoires de la traite négrière, de l’esclavage et de leurs abolitions. Cette année, le président de la République ne prend pas part aux célébrations. Le premier ministre Gabriel Attal a présidé la cérémonie qui s’est déroulée cette à La Rochelle. Ces commémorations nationales sont une reconnaissance nationale de ce crime historique mais qui a été un long très long cheminement.

Par cette loi, la République française reconnaît que la traite négrière transatlantique ainsi que la traite dans l’océan Indien d’une part, et l’esclavage d’autre part, perpétrés à partir du XVe siècle, aux Amériques, aux Caraïbes et dans l’océan Indien contre les populations africaines, amérindiennes, malgaches et indiennes constituent un crime contre l’humanité.

De même, elle prévoit qu’une place conséquente soit accordée à la traite négrière et à l’esclavage dans les programmes scolaires ainsi que dans les programmes de recherche en sciences humaines et en histoire. Enfin, elle prévoit qu’une demande de reconnaissance comme crime contre l’humanité soit déposée auprès de différentes organisations internationales.

Cette année, c’est le premier ministre Gabriel Attal qui a présidé la cérémonie annuelle et contrairement aux autres années, celle-ci ne s’est pas déroulée dans les Jardins du Luxembourg, elle s’est tenue à La Rochelle. Tout un symbole puisque la ville côtière française a été durant la triste période esclavagiste l’un des plus grands ports négriers français et même européens. Puis, comme le soulignent nos confrères de La 1ère, En 1594, L’Espérance, premier bateau négrier à quitter les côtes françaises, part du port de La Rochelle pour l’Afrique. La ville fut la première cité française à se lancer dans le commerce triangulaire. Du XVIe au XIXe siècles, 446 autres navires emprunteront le même itinéraire, faisant de la commune le deuxième port négrier de France, derrière Nantes.

Selon Matignon, la délocalisation découle de la volonté de sortir du microcosme parisien et de faire participer le plus de Français possible à l’exercice très codifié du devoir de mémoire. Reste qu’à quelques semaines des élections européennes, certains y voient un calcul plus politique : l’année dernière, la cérémonie du 10 mai avait été réduite au strict minimum, certes en présence de la Première ministre de l’époque, Elisabeth Borne, mais sans aucune prise de parole politique.

Pour l’ancien premier ministre et président de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage, Jean-Marc Ayrault, ce nouveau format est un « hommage aux villes, aux départements et aux régions qui se sont engagés depuis des années comme des précurseurs pour (…) assumer cette histoire ». De quoi donc rappeler que l’histoire de l’esclavage ne s’est pas déroulée uniquement dans les lointaines colonies d’Amérique, de la Caraïbe et de l’océan Indien, mais également sur le territoire européen mais aussi, rappeler que la puissance de la France s’est aussi construite sur la traite et que de très nombreuses villes, La Rochelle, mais aussi Nantes, Bordeaux, Marseille ou le Havre, ont profité du commerce triangulaire pour s’enrichir.

 À cette occasion, une statue nommée « Clarisse » a été inaugurée sur le quai Aimé-Césaire. Elle représente une esclave nourrisse, installée à proximité de l’ancien port négrier rochelais et elle est le fruit de la réalisation de l’artiste haïtien Fillipo qui s’est exprimé au sujet de l’idée de son oeuvre :

Fillipo.

Clarisse est un personnage qui a bel et bien existé, elle a été affranchie en 1794 à La Rochelle mais Filipo a souhaité lui donné une dimension plus large.

Fillipo

L’ancien premier ministre désormais président de la Fondation pour la mémoire de l’esclavage, a aussi pris la parole et à rappeler la sacrifice par lequel les haïtiens sont passés pour avoir leur liberté. Une liberté volée par l’indemnité réclamée par la France de Charles X.

Jean-Marc Ayrault-Président de la Fondation pour la Mémoire de l’esclavage.

Pour lui 2025 serait l’année du grand geste pour le peuple haïtien. Les conditions de l’indépendance d’Haïti imposée par la France sont pour de nombreux experts aux origines de la pauvreté structurelle qui mine le territoire, ravagé par les gangs.

Le premier ministre Attal a aussi prononcé un discours d’hommage de plus de vingt minutes dans lequel il s’est contenté de rappeler que la France « est mobilisée aux côtés de la communauté internationale pour aider les populations face aux besoins humanitaires ». Saluant « le poids de ceux qui brisèrent eux-mêmes leurs chaînes », le Premier ministre a pris la parole pendant plus d’une vingtaine de minutes.

Gabriel Attal- Premier ministre.

 Il a annoncé une grande exposition nationale sur la Mémoire de l’esclavage en 2026, année des 25 ans de la loi reconnaissant l’esclavage comme un crime contre l’humanité. Un label « Mémoire de l’esclavage » sera par ailleurs créé pour mieux identifier les sites patrimoniaux ou mémoriels. Le mémorial en hommage aux victimes de l’esclavage – promesse présidentielle que l’on pensait oublier, sera érigé dès l’an prochain.

Le président de la République a lui aussi tenu à rendre hommage :