Petit il chantait dans l’église de ses parents, aujourd’hui, il est à la tête du plus grand choeur Gospel de France et même d’Europe, Max Zita est notre invité dans “ Rencontre Avec “.
En général, quand on dit Gospel on pense au sud des Etats-Unis, aux églises , nommées les Big Church où se rendent par centaines voire par milliers les afro-américains pour célébrer et communier le dimanche tous ensemble comme le faisaient leurs ancêtres esclaves noirs qui travaillaient dans les terribles plantations de champs de coton ou de canne à sucre avec que la musique et la foi en Dieu comme moyens de distraction pour s’échapper de leur vie miséreuse. Et vous n’avez pas tort puisque c’est bien dans les méandres de l’histoire tragique de l’esclavage que le Gospel ( Godspell) comprenez évangile, prend racine.
Tout a donc commencé à la fin du XVIIe et XVIIIe siècle avec l’arrivée des premiers esclaves noirs dans cette partie du continent américain. Comme partout sur cette terre d’Amérique, ils n’avaient pas le droit d’exprimer leurs sentiments ni même de faire vivre leurs cultures originelles venues d’Afrique, qu’elles aient été musicales que cultuelles. Totalement désocialisés, ils doivent réinventer des liens communautaires qui ne peuvent plus être ceux de l’Afrique et se créer des biens immatériels : prière, spiritualité, musique à travers des chants de travail ou wokrsongs qui sont à l’origine des negro spirituals qui apparaissent au XVIIIe siècle en lien avec l’émergence des Églises noires puis des gospel hymns qui se développent au XIXe siècle. Derrière ces chants religieux anodins, ils pouvaient se transmettre des messages codés que les maîtres ou les contremaitres ne pouvaient pas comprendre.
Ces chants vont intégrer les grands cultes religieux organisés par les pasteurs évangéliques blancs des Etats du Sud dits de la Bible Belt lors du Grand réveil, ce mouvement religieux qui a égrené l’ensemble du territoire sudiste à la fin du XIXe début XXe siècle. Ces pasteurs préféraient axés leurs offices religieux sur les chants et autres célébrations musicales suivis de lectures simplifiées de la Bible afin que tout le monde puisse comprendre les Saintes écritures. Une évolution et une révolution même, qui va permettre aux esclaves et leurs descendants de forger leur foi dans ce Dieu qui leur avait été imposé. Quelques-uns de ces hommes d’église vont arpenter le territoire des Etats-Unis comme des itinérants et vont intégrer cette musique dans leurs messes. Peu à peu, le negro spiritual va être indéniablement associé à la religion et depuis est indissociable des célébrations évangéliques, adventistes et pentecôtistes. Cependant, c’est à la fin des années 1930 et même fin des années 1940 début 1950 que le Gospel va quitter le domaine religieux pour le domaine musical généraliste grâce à des producteurs installés dans les grandes villes états-uniennes qui avaient flairé le potentiel de cette musique longtemps réservée aux noirs.
Aujourd’hui, il est clair que le Gospel est bien plus d’une musique divine. Il s’est démocratisé et même les profanes y ont accès via des concerts ou des musiques où figurent des groupes de Gospel. Mais, s’il y a bien un élément qui va faire de ce style né dans la douleur, une musique de référence mondiale, c’est bien Sister Act, joué par Whoopi Goldberg. La France va elle aussi succomber aux charmes de cette musique.
Parmi les précurseurs du genre, il y a Max Zita qui a même favorisé sa démocratisation. Avec son groupe Gospel Voices qu’il fonde en 1988. Petit il chantait dans l’église de ses parents, aujourd’hui, il est à la tête du plus grand choeur Gospel de France et même d’Europe, Max Zita est notre invité dans “ Rencontre Avec “.
Max Zita bonjour, merci de prendre de votre temps durant vos vacances au pays, pour répondre à nos questions. Aujourd’hui, nous parlerons musique. Mais avant tout, qui êtes-vous et quel est votre parcours artistique ?
Max Zita : Avant de me présenter, merci pour votre invitation merci aussi déjà du travail que vous fêtes. A la question qui-suis-je, je suis Max Zita, chef de cœur de son état, je suis un artiste professionnel mais également un producteur professionnel dans le domaine du gospel ainsi que du coaching vocal et du développement personnel.
Comment votre passion pour la musique est-elle née ?
Max Zita : Je viens de la Guadeloupe particulièrement de la commune de Sainte-Anne, on dira que je suis issus d’une lignée où nous avons des musiciens. Du côté de mon père l’était, j’ai deux arrières grand-parents qui l’ont été. Ils avaient des orchestres avec lesquels ils étaient souvent en ripaj comme on dit lors des grands bals donnés à l’époque, après ça s’est décliné chez mon grand-père puis chez mon père qui était lui-même chef de cœur et enfin moi par la suite, j’ai décidé d’en faire ma carrière. En effet, quand j’ai eu l’âge de 20 ans après avoir passé mon bac, je me suis dit qu’est-ce que je savais faire de mieux ? Il n’y avait que la musique que je me voyais faire et en l’occurrence comme j’avais déjà un petit groupe qui s’appelait Pléade, dans lequel on avait fait nos premières armes, du coup j’ai décidé d’aller faire une licence en musicologie et c’est parti comme ça. Depuis 1988 je suis considéré comme un professionnel de la musique.
C’est donc une passion familiale ?
Max Zita : Disons que oui, je dirais que c’est un héritage familial et que j’ai professionnalisé mais que j’ai ressenti aussi en tant que que cheminement personnel
A la différence d’autres artistes, vous, vous avez étudié la musique. Mais où avez-vous fait vos études ?
Max Zita : J’ai fait mes études à Paris VII où il y avait pas mal de Guadeloupéens aussi qui faisaient des études. Je pense à des gens comme Toto Rico ou encore Eddy Pittard. Ils ont été comme des mentors pour moi puisqu’ils avaient déjà un pied dans le milieu de la musique professionnelle par rapport à moi qui arrivait. Toutefois, je me suis toujours dit que je voulais faire de la musique qui me faisait vibrer et celle-ci fut le Gospel genre musical créé par les afro-américains et avec ce genre que je voulais me développer artistiquement.
Justement, pourquoi avoir choisi le Gospel et pas nos musiques traditionnelles comme le zouk, le bélè, le quadrille ? Comment votre amour pour le Gospel, musique noire américaine, est-il né ?
Max Zita : Le fait est que dans ma famille, nous avons baigné dans le mouvement adventiste. Dans ma famille, j’ai cinq pasteurs dans ce mouvement qui fait que j’ai vraiment grandi dans cet univers très religieux. Il est vrai que ces milieux peuvent être hermétiques mais ça a été pour moi l’occasion de découvrir le gospel vu qu’il y avait des pasteurs venus des Etats-Unis pour prêcher et ils venaient avec des groupes de Gospel pour faire ce qu’on appelle des semaines d’évangélisation. C’est donc là que j’ai découvert cette musique. De plus, une fois, mon grand-père avait mis un quarante-cinq tours du Golden Gate Quartet et j’ai de suite accroché à ce style qui m’avait touché. Ce style correspondait à qui j’étais vraiment.
Qui sont les modèles qui vous ont influencé au point de vous lancer musicalement ?
Max Zita : A vrai dire, l’envie d’être un musicien professionnel c’est venu plutôt par la pratique de la musique que j’ai commencé assez tôt et à 16 ans, avec des amis, nous avions déjà un groupe de gospel qui s’appelait Pléade. C’était en Guadeloupe. Nous étions l’un des premiers groupes à organiser des concerts payants. Notre premier concert a eu lieu aux Abymes. Nous avions seize ans mais on s’était occupé de tout c’est-à-dire faire la billetterie, faire l’affiche, faire la promotion etc. Vous voyez, dès mes premières armes en tant que musicien j’avais aussi ce côté producteur. Nous avons même été faire des concerts, des tournées en Martinique, dans des églises adventistes. Joël Pharaon et moi on avait pris un avion pour aller à la rencontre des pasteurs de ces églises pour organiser le voyage du groupe et organiser aussi bien sûr l’hébergement, le transport des membres du groupe, ainsi que les prestations. Ce fut une belle expérience qui m’a enrichi et qui m’a donné l’envie d’être professionnel.
C’est la raison pour laquelle vous êtes parti en France pour oui pour perfectionner ?
Max Zita : Oui. Je voulais me professionnaliser et comme à l’époque, il n’y avait aucune filière musique, j’ai dû faire le choix de partir. Je ne sais pas si jusqu’à maintenant si la filière musique existe en Guadeloupe ? Si non, je salue l’initiative entreprise par le Lycée Carnot qui est l’une des premières si ce n’est la première filière musique de France, mais à mon époque, il n’y avait pas tout ça. Si on voulait se perfectionner dans le domaine des Arts et de la Musique, il fallait partir dans l’Hexagone pour faire des formations théoriques et ensuite pour en vivre en créant un groupe, ce que j’ai fait d’ailleurs en 1988 lorsque j’ai créé Gospel Voices qui est jusqu’à présent le groupe avec lequel j’officie en tant que chef de cœur. Depuis la création de mon groupe, j’ai collaboré bien sûr avec beaucoup d’artistes très connus.
Venons-en à Gospel Voices, comment est née votre troupe de danse ? Qu’est-ce-qui vous a poussé à la créer ?
Max Zita : A vrai dire, tout s’est enchaîné assez vite. J’avais déjà le groupe Pléade en Guadeloupe, nous avions à peu près tous vingt ans. Nous avons pris l’avion direction Paris pour faire nos études. En parallèle de nos études, nous faisions toujours des concerts même dans l’Hexagone. Par exemple, nous avons joué dans l’église américaine ainsi que dans le théâtre Janzé. Puis, les choses ont fait que j’ai quitté la formation. Par la suite, j’ai collaboré avec un autre pendant un an qui s’appelle Gospel Card Singles dont la cheffe de coeur c’est MoniqueAnge Hertin qui est ici aussi d’ailleurs et qui dirige une nouvelle formation depuis. Cependant, j’avais l’envie de créer mon groupe et c’est ce qui m’a poussé à faire Gospel Voices en 1988 et des artistes comme Benjamin Faleyras qui a été le créateur de la comédie musicale Gospel sur la colline ou encore Isambert Poussé. Il y avait aussi à l’époque France César avec lequel je collaborait déjà dans une autre formation qui se nommait Echo et ensemble on faisait un quatuor vocal. Comme quand j’étais en Guadeloupe, nous avons tout fait de A à Z. A savoir, organisé le premier concert qui a eu lieu dans une salle à Châtelet les Halles. Nous avons pris un week-end pour coller les affiches, faire la billetterie. Nous avons appris sur le tas à faire la partie production.
Et quel fut l’accueil du public Hexagonal à vos débuts ?
Max Zita : Pour être honnête, la réaction du public a toujours été positive. Elle nous a toujours porté. Très vite, nous avons été sollicités dans des festivals, dans des grandes messes, pour les mariages etc. Parallèlement à ça, il y avait un film qui cartonnait à l’époque c’était Sister Act avec Whoopi Goldberg qui a donné un élan énorme au fait qu’on puisse se produire en France.
Et quels sont les artistes en France ou en Europe avec lesquels Gospel Voices à chanter ?
Max Zita : Je dirais quelques noms les plus connus que sont , Nicoletta avec lequel nous avons fait un projet qui a été Nicoletta & Gospel Voices. L’album s’est venu à soixante-dix mille exemplaires, ce qui n’est pas rien. Nicoletta est un peu la marraine du groupe, avec elle nous avons fait au moins dix-sept télévisions, ce qui nous a permis d’être repérés par la suite. Nous avons collaboré avec Johnny Hallyday avec qui nous avons tourné dans le film “ Jean-Philippe.” dans lequel on apparait. Nous avons aussi chanté avec Christophe Maë ou encore Eddy Mitchell ou encore Lara Fabian et même Céline Dion. Nous avons aussi fait un plateau aussi Garou. A l’international, je peux citer Rhoda Scott.
Justement en parlant de ces artistes que vous avez cité, comment se déroule la collaboration ? Est-ce eux qui vous contactent directement ou ce sont leurs labels, leurs agents, leurs Maisons de disques ?
Max Zita : Très souvent c’est soit leurs équipes, sauf Nicoletta, ce fut par le biais d’une amie en commun mais la plupart, ce sont les équipes de production les DA(Diretions artistiques) qui nous contactent.
Il est vrai que vous parlez de 35 ans de carrière quel fut ? ou quel est votre meilleur souvenir de concert ? de studio ?
Max Zita : Disons qu’au fil des ans il y a une rencontre que j’ai faite avec un producteur avec lequel j’ai monté le concept Gospel pour cent voix. Cette expérience a été un des moments forts de ma carrière. Nous avons fait plusieurs Zeniths en France et même un Bercy en 1998. Pour ce concert, il y avait plusieurs groupes de gospel dont Gospel Voices, il s’agissait d’un concert en hommage aux cents cinquante ans d’abolition de l’esclavage. Avec ce concept, j’ai été jusqu’en 2000, puis j’ai laissé tomber à cause de problèmes avec le producteur mais il continue d’exister. Après, j’ai eu d’autres bons moments notamment avec Johnny Hallyday lors du tournage de Jean-Philippe. Nous avons eu de bons moments pendant cinq jours. J’ai d’autres bons souvenirs avec Lara Fabian avec qui on a collaboré avec un projet d’hologramme.
Depuis sa création, Gospel Voices est devenu une référence en France et au-delà, était-ce difficile de l’imposer dans le paysage musical français et européens ?
Max Zita : Je ne peux pas dire que le Gospel a eu des aprioris. Au contraire. L’accueil fut favorable, sans doute grâce au film Sister Act, ce qui a permis un engouement de la part du public hexagonal quel que soit l’ethnie.Cela a même été une bonne rampe de lancement pour nous vu que nous avons animé des mariages, des baptêmes et pleins d’autres événements intimistes. A ce jour, il y a une vraie demande auprès des groupes gospel qui sont conviés chaque week-end à animer ces événements. Au moment où nous parlons, il y a plus d’une centaine de groupe de Gospel en France qui participent à la vie culturelle, religieuse et familiale. C’est devenu un vrai secteur d’activités qui permet à certains artistes d’être professionnels et d’en vivre en étant intermittents du spectacle.
Est-ce que Gospel Voices est une école ? Est-ce qu’il y a eu des artistes qui ont émergé grâce à vous ?
Max Zita : On peut dire que Gospel Voices a toujours servi de tremplin. Je peux citer des artistes comme Dominique Magloire qui a participé à Gospel Voices mais aussi Gospel pour cent voix. Ces deux concepts ont vraiment favorisé l’émergence de ces artistes pour lancer leurs carrières.
Max Zita, nous arrivons presque au bout de cette interview qui est assez intéressante quelle sera votre actualité à la rentrée de Septembre ?
Max Zita : Alors, comme chaque année, la rentrée de septembre mon actualité sera axée sur la mise en place des Masterclass un peu partout en France, que ça soit à Bordeaux, Paris, Marseille et même ici en Guadeloupe. Il y a aussi les voyages que j’organise. Des voyages que j’appellent Gospel aux racines. Donc j’emmène des gens aux sources du gospel, à savoir l’Afrique. Nous faisons une pierre deux coups car nous venons aussi faire du un travail solidaire chacun doit porter une valise de 23 kg, dans lequel il y aura des du matériel scolaire on va donner à des organisations s’occupant d’enfants, au Bénin. Le prochain voyage se fera en Mai 2025. Cela fait trois ans que j’ai mis en place ce dispositif. D’ailleurs, il y aura des gens qui partiront depuis la Guadeloupe. Je vais commencer à communiquer dessus en début septembre. Dans l’immédiat, une tournée de dix concerts qui m’attendent à partir du 17 août jusqu’au 25 août dans les villes comme Alby, Bordeaux, La Rochelle voilà avec une formation que s’ appelle Gospel Voices Quartet…
Vous vous produisez uniquement en France ou vous allez dans d’autres pays ?
Max Zita : Non, on a fait des concerts au Bénin, au Maroc, et même aux Etats-Unis lors de nos voyages là-bas durant les conventions religieuses.
Où est-ce que l’on pourra suivre cette actualité ? Êtes-vous sur les réseaux sociaux ?
Max Zita : Oui. Il y a déjà Max Zita sur Facebook, Instagram : Sam 971. De plus, il y a aussi mon site Max Zita & Gospel Voices que vous pouvez trouver. Il y a nos programmes de l’année et il y a même un espace où vous pouvez poser vos questions et faire vos demandes voilà.
Merci Max Zita, ce fut un honneur de vous recevoir.
Max Zita : Merci tout plein. Ne lâchez pas.