Le mardi 21 octobre, les eurodéputés ont définitivement adopté une vaste réforme du permis de conduire au sein de l’Union européenne. Fin du permis à vie, visite médicale obligatoire, période probatoire harmonisée et application transfrontalière des sanctions : ces nouvelles mesures, qui entreront en vigueur d’ici fin 2029, visent à renforcer la sécurité routière. La durée de validité du permis sera désormais limitée à 15 ans, marquant un tournant historique pour les conducteurs européens.
C’est sans doute la mesure la plus emblématique de cette réforme, qui marque un véritable tournant dans la philosophie du permis de conduire en Europe. Le célèbre document rose, valable à vie pour des générations d’automobilistes, appartient désormais au passé. Désormais, les permis pour voitures et motos auront une durée de validité maximale de 15 ans, pouvant être réduite à 10 ans dans les pays où le permis fait également office de pièce d’identité.
Cette révolution touche autant les nouveaux conducteurs que les titulaires actuels. Les anciens permis cartonnés, sans date de validité, devront être remplacés avant le 19 janvier 2033. Quant aux détenteurs des permis au format carte, délivrés depuis 2013 et déjà limités à 15 ans, ils devront eux aussi se soumettre à une nouveauté de taille : la visite médicale obligatoire. Ce qui n’était autrefois qu’une simple formalité administrative devient désormais un véritable contrôle de l’aptitude à conduire. Enfin, la durée de validité pourra être réduite pour les conducteurs de plus de 65 ans. Notons que les permis de conduire pour les camions et les autobus auront une durée de validité de cinq ans.
Dans le cadre de cette réforme, la Commission européenne ambitionne de mettre en place un permis de conduire numérique unique pour les 27 États membres. Ce document dématérialisé serait stocké directement sur le smartphone des conducteurs, remplaçant ainsi la traditionnelle carte plastifiée.
Si la France a déjà franchi le pas avec l’application France Identité, la plupart des pays européens n’en sont pas encore là. L’objectif de cette initiative est donc d’harmoniser les pratiques, faciliter les contrôles et renforcer la coopération entre les États en matière de sécurité routière.
Cette réforme prévoit également des règles de renouvellement plus strictes, des critères d’obtention renforcés et un meilleur partage d’informations entre les pays membres — une étape de plus vers une véritable Europe du permis de conduire.
De plus, ce permis numérique va permettre de fluidifier les déplacements transfrontaliers. Par exemple, un conducteur qui voyage souvent entre la France et l’Allemagne n’aura plus à s’inquiéter des différences de reconnaissance. En plus, cela va représenter un gain de temps considérable pour les autorités. Mais, surtout, cela va faciliter les contrôles et les sanctions entre les différents pays européens, en palliant à l’actuel manque de coordination entre les permis nationaux.
Ainsi, les permis expirés ou suspendus pourront être désactivés instantanément grâce au système numérique commun à l’ensemble des États membres. Aujourd’hui, une personne dont le permis est invalidé doit encore se présenter physiquement au tribunal pour le restituer, une démarche souvent repoussée. Dans le futur, ce processus sera automatisé et valable au-delà des frontières : si un Français voit son permis suspendu pour une infraction en Espagne, l’information sera immédiatement transmise, empêchant toute conduite illégale ailleurs en Europe.
D’autre part, la réforme introduit également une période probatoire de deux ans pour les nouveaux conducteurs, durant laquelle ils devront respecter des règles de conduite plus strictes et s’exposeront à des sanctions renforcées en cas d’infraction.
C’est aussi l’occasion d’unifier les périodes probatoires des jeunes conducteurs à l’échelle européenne. En France, elle dure actuellement trois ans ou deux ans en cas de conduite accompagnée, durant lesquels le conducteur doit arborer le célèbre « A » sur son véhicule. À partir de 2030, cette période devra être d’au moins deux ans dans toute l’Union européenne, pendant laquelle les jeunes conducteurs seront soumis à des règles et des sanctions plus strictes, notamment en cas de conduite sous l’emprise de l’alcool ou de drogues.Concernant l’alcool, la France va pour l’instant maintenir son seuil de 0,5 g/l pour les conducteurs confirmés, mais la poussée européenne vers des règles plus strictes pourrait influencer les débats nationaux.
L’examen du permis sera substantiellement étoffé avec l’introduction de questions obligatoires sur les angles morts, les systèmes d’assistance à la conduite, l’ouverture sécurisée des portes et les risques de distraction liés à l’utilisation du téléphone. La formation devra également intégrer une sensibilisation accrue aux usagers vulnérables : piétons, cyclistes, enfants et personnes à mobilité réduite.
Autre nouveauté : les jeunes dès 17 ans pourront désormais s’initier à la conduite, que ce soit en voiture ou à moto, dans le cadre de la conduite accompagnée. En revanche, l’âge légal pour conduire seul reste fixé à 18 ans.
L’une des avancées majeures de cette réforme concerne désormais l’application transfrontalière des sanctions dans toute l’Union européenne. Jusqu’à présent, près de 40 % des conducteurs sanctionnés à l’étranger retrait ou suspension de permis échappaient à toute conséquence dans leur pays d’origine.
Ces nouvelles règles entreront en vigueur le vingtième jour suivant leur publication dans le Journal officiel de l’Union européenne. Les pays de l’UE disposeront de trois ans pour transposer ces nouvelles dispositions dans le droit national et d’une année supplémentaire pour préparer leur application.
Ce « vide judiciaire » prend fin grâce à la mise en place d’un système d’échange automatique d’informations entre les États membres. Concrètement, toute décision de retrait, de suspension ou de restriction d’un permis sera immédiatement transmise au pays qui l’a délivré.
Cette mesure cible avant tout les infractions les plus graves : excès de vitesse supérieurs à 50 km/h, conduite sous l’emprise d’alcool ou de stupéfiants, ou encore accidents mortels. Comme l’a rappelé le rapporteur du texte, Matteo Ricci, eurodéputé socialiste italien, il s’agit de mettre fin à une incohérence qui affaiblissait la crédibilité du système répressif européen.
Avec près de 20 000 morts sur les routes en 2024, l’UE espère que ces mesures, combinées à d’autres initiatives comme le développement des technologies de sécurité des véhicules, contribueront significativement à rendre les routes européennes plus sûres pour tous les usagers.

