La décision était attendue depuis de nombreuses années et pour les adeptes de Marijuana, c’est le soulagement. A l’issue d’un procès commencé en 2015, les huit juges sur les onze que compte la Cours Suprême du plus grand pays d’Amérique Latine, ont décidé mardi 25 juin 2024 que l’usage personnel ne ferait plus l’objet de sanction mais resterait un acte illicite.
Les fumeurs de cannabis Brésiliens ont attendu longtemps pour qu’un jour, leur pays, d’ordinaire assez ultraconservateur et religieux ne franchisse le pas de décriminalisation de la plante. Pourtant, la plus haute instance judiciaire du Brésil, la Cour suprême basée à Brasilia, a voté mardi 25 juin, en faveur de la dépénalisation de la possession de cannabis pour usage personnel, avec huit votes sur onze. Cette décision, prise lors d’un long procès qui a suscité des clivages profonds dans la plus grande nation d’Amérique latine, stipule que bien que la possession de cannabis reste un acte illicite, elle ne devrait plus être passible de sanctions pénales.
Le président de la plus haute juridiction du Brésil, Luis Roberto Barroso, a précisé qu’il ne s’agissait « en aucun cas d’une légalisation » du cannabis. Les onze juges de la Cour suprême doivent encore fixer la quantité maximale autorisée pour une consommation personnelle, lors d’une nouvelle session prévue mercredi. Ce procès au long cours a commencé en 2015 et a été interrompu à plusieurs reprises notamment lors du mandat de Jair Bolsonaro président ultradroite et ultra conservateur qui s’y opposait fermement.
La législation actuelle, qui date de 2006, considère comme un délit « l’acquisition, la possession ou le transport de drogues sans autorisation ». Cette infraction est prévue au code pénal mais n’est plus passible d’une peine d’emprisonnement, comme c’était le cas dans le texte précédent, qui prévoyait une peine de six mois à deux ans de réclusion. Cependant, ces infractions ne sont plus punissables par une peine d’emprisonnement, contrairement à la loi précédente qui prévoyait une peine d’emprisonnement de six mois à deux ans. La loi de 2006 ne précise pas la quantité précise de cannabis qui peut distinguer un utilisateur des trafiquants, qui risquent des peines plus sévères. Cette distinction est actuellement laissée à la discrétion des forces de l’ordre, des procureurs ou des juges de première instance, sans critères objectifs. Les conservateurs s’opposent à cette décision mais les premières victimes de cette loi sont évidemment les afrobrésiliens. C’est ce que dénonçait lors du procès daté d’août 2023, le juge Alexandre de Moraes : « les jeunes, surtout les Noirs, sont considérés comme des trafiquants s’ils sont arrêtés en possession de quantité de drogues bien moins importantes que des Blancs de plus de 30 ans ».
Malgré cette avancée, 72% des Brésiliens encore conservateurs disent s’y opposer fermement et du côté de la Loi, en avril, le Sénat a voté en faveur d’un texte visant à amender la Constitution afin de considérer la possession de toute drogue comme un délit, y compris le cannabis. Cet amendement constitutionnel doit être révisé par la Chambre des députés dans un futur proche. On est donc loin d’un usage légal de la plante la plus consommée.
Au Brésil, l’utilisation du cannabis à des fins médicales est également sujet de débat. Des patients ont dû aller devant les tribunaux pour obtenir le droit d’utiliser des traitements à base de CBD, la molécule non psychotrope du cannabis, pour certaines formes sévères d’épilepsie.
A ce stade, de nombreux pays ont dépénalisé l’usage récréatif du cannabis, renonçant aux peines de prison pour les consommateurs, c’est le cas de l’Italie, le Mexique, les Pays-Bas, le Portugal ou encore la Suisse mais ils sont plus rares à l’avoir légalisé, comme l’Uruguay, en 2013, ou l’Allemagne, en février, la Jamaïque ou l’Autriche.
Selon le rapport de l’ONUDC, le nombre de personnes consommant des drogues illicites est passé à 292 millions au cours de la décennie qui s’achève en 2022. Il note que la plupart des usagers dans le monde consomment du cannabis 228 millions de personnes tandis que 60 millions de personnes dans le monde consomment des opioïdes, 30 millions des amphétamines, 23 millions de la cocaïne et 20 millions de l’ecstasy, comme l’indique l’ONU.