Aurélie Victoire-Célanie : “  je suis de retour en Guadeloupe pour renouer avec les fondements de ma pratique artistique “ 

Aurélie Victoire-Célanie est une jeune artiste guadeloupéenne qui a fait le choix du retour au pays. Un retour qu’elle voit comme une opportunité pour se développer tant humainement qu’artistiquement. Elle nous a reçu dans au Confluence studio, son atelier situé au coeur du centre-ville de Pointe-à-Pitre pour revenir sur son parcours et son choix de revenir chez elle pour apporter à sa façon sa touche à l’art guadeloupéen.  

Il y a une phrase qui dit que l’art est l’expression la plus noble du génie du genre humain et elle colle parfaitement la Guadeloupe. En effet, il est vrai que l’archipel français des Caraïbes brille de mille feux sur les podiums des différents concours de beauté nationaux ou internationaux ainsi que dans le sport où on ne compte même plus le nombre de sportifs français d’origine guadeloupéenne ou nés en Guadeloupe qui raflent des médailles.  

Cependant, il n’y a pas que dans ces deux domaines que la Guadeloupe excelle. L’art aussi est un domaine où nombre de Guadeloupéens ou Guadeloupéennes perfoment. Désormais le monde artistique est bouillant, des noms parviennent à s’exporter. Disons-le, il est fini le temps où l’art guadeloupéen et plus spécifiquement l’art des Antilles-Françaises n’étaient pas vendeurs. Il faut dire qu’à l’époque, ils étaient peu à parvenir à la reconnaissance du marché international. Faute sans doute à une manque de visibilité de nos territoires ce qui entraînait une certaine méconnaissance de la part des commissaires ou des organisateurs d’expositions internationales. Depuis, les choses ont changé, rien qu’au niveau local, les expositions se sont multipliées. Du côté de l’international, la participation d’artistes guadeloupéens ou martiniquais à des salons, des foires ou autres résidences s’est véritablement accrue. Dans une moindre mesure, les politiques culturelles menées par les collectivités locales favorisent également cette mise en lumière de ces talents bien de chez nous.  

Parmi la nouvelle génération d’artiste on retrouve, Aurélie Victoire-Célanie, une jeune artiste guadeloupéenne qui a fait le choix du retour au pays. Un retour qu’elle voit comme une opportunité pour se développer tant humainement qu’artistiquement. Elle nous a reçu dans au Confluence studio, son atelier situé au cœur du centre-ville de Pointe-à-Pitre pour revenir sur son parcours et son choix de revenir chez elle pour apporter à sa façon sa touche à l’art guadeloupéen. 

Aurélie Victoire-Célanie dans son atelier. Photo : ELMS Photography

Bonjour, Aurélie Victoire Célanie, merci de nous recevoir dans ton atelier, premièrement, que représente ce lieu pour toi ?   

Aurélie Victoire-Célanie : Bonjour, merci à vous de me donner la parole. C’est un réel plaisir pour moi de vous accueillir justement dans mon atelier. A la question que représente-t ’il, c’est le fruit de mon désir de vouloir travail dans des conditions optimales. Un artiste a besoin d’un atelier pour pouvoir se développer. Dans mon cas, je devais réaliser des toiles de format imposant ( du 2m/1m50) j’avais donc besoin d’un espace assez grand. Par la suite, c’est un espace que je souhaite, pouvoir ouvrir à des événements tels des expositions, des cours, des mini-concerts etc. Pour moi, il est appelé à devenir un lieu de vie. Certes, c’est mon lieu de travail mais ce sera aussi un lieu de rencontre et d’échange.  

Et où se trouve ton atelier ?  

L’atelier se situe au 26 rue Sadi Carnot, juste à côté du Lycée et du Collège Carnot et juste en face du Musée L’Herminier à Pointe-à-Pitre.  

Aurélie Victoire-Célanie dans son atelier. Photo : ELMS Photography

Mais avant tout, qui es-tu ? D’où viens-tu ? 

Je suis une Guadeloupéenne qui est née et a grandi à Pointe-à-Pitre. J’ai réalisé un cursus d’art au Lycée Rivière des Pères à Basse-Terre qui se nomme aujourd’hui Raoul Georges Nicolo. J’ai obtenu un Baccalauréat STI Art Appliqué. A mes dix-neuf ans, j’ai fait une Classe Prépa au Centre des Métiers d’Art à Pointe-à-Pitre.  Par la suite, je suis partie pour poursuivre mes études supérieures d’art dans l’Hexagone premièrement aux Beaux-Arts de Besançon où j’ai entamé un cursus de cinq ans, d’ailleurs lors de la quatrième année, grâce à un dispositif comme ERASMUS, j’ai eu la possibilité d’effectuer un semestre d’échange au Edna Manley College of the Visual and Performing Arts, à Kingston, en Jamaïque. Là-bas, j’ai perfectionné mon anglais et cultivé mon intérêt pour la culture matérielle et les identités créoles présentes dans la région des Caraïbes. En 2018, j’ai été diplômé d’un DNSEP en Art ( grade Master) délivré par l’Institut des Beaux-Arts de Besançon, avec un corpus d’œuvres exclusivement tourné vers la créolisation, accompagné d’un mémoire sur l’art touristique, l’artisanat et la narration touristique.  

Désireuse de poursuivre mes études en Art, j’ai intégré la Haute École des Arts du Rhin de Strasbourg où je me suis concentré sur l’orfèvrerie de chez nous. En Septembre 2020, j’ai eu un diplôme DNSEP en Art-Obet option Bijoux. Poussée par l’ambiance morose du début de crise Covid-19, j’ai décidé de revenir chez moi, en Guadeloupe et de m’y développer artistiquement et professionnellement parlant. D’ailleurs, j’ai été pigiste pour JOHO, un magazine spécialisé dans la bijouterie et la joaillerie, pour sa rubrique historique.  

Que représente l’art pour toi et comment as-tu vu que c’est dans ce domaine que tu voulais évoluer ? 

Aurélie Victoire-Célanie : Dès notre enfance, ma mère a fait en sorte de stimuler les centres d’intérêts de chacun de ses enfants afin que nous puissions nos déclinaisons en termes de talent. Me concernant, très jeune, je dessinais beaucoup. J’aimais faire des activités manuelles avec ma mère qui m’a inscrite au Centre des Métiers d’Art car elle avait déduit que cette passion allait continuer de me suivre une fois adulte. Au collège, j’ai commencé à vraiment m’y intéresser et à développer une appétence pour ce domaine. Ensuite, j’ai intégrété un BAC STI au Lycée pour finir Besançon, la Jamaïque et enfin Strasbourg.  Vous l’aurez compris que l’art fait partie de ma vie, que dis-je, l’art, c’est ma vie.  

Aurélie Victoire-Célanie dans son atelier. Photo : ELMS Photography

As-tu des artistes que tu apprécies et qui t’ont inspiré et incité à te lancer toi aussi ? 

Aurélie Victoire Célanie : A vrai dire, en matière d’artistes locaux qui auraient pu m’inspirer, je n’en ai pas vraiment, hormis lorsque j’étais petite, je suivais les travaux de Félie Line Lucol. Ce n’est qu’une fois en France, en développant ma propre pratique artistique que j’ai commencé à avoir des références comme Barthélémy Toguo, Yinka shonibare ou Kader Attia et d’autres artistes qui traitent de thématiques comme la colonisation ou de questions post-coloniales.  Ce sont ces artistes qui m’ont inspiré pour ce qui est de ma pratique d’installation. Depuis que je suis retourné en Guadeloupe, je travaille plus la peinture en autonomie en fonction de mon inspiration. J’essaie de travailler la technique pour servir le propos.  

Comme tu es artiste, tu as sans doute eu des expériences dans le domaine en matière d’exposition, quelles sont-elles ? 

Aurélie Victoire-Célanie : Depuis que j’ai été diplômée en 2020, nous étions en pleine période Covid-19, ce n’était clairement pas le bon moment pour faire une exposition vu les restrictions sanitaires. Je suis retournée en Guadeloupe en 2022, depuis, j’ai eu l’occasion d’exposer au Greens Hostel, mais aussi lors de la Route du Rhum au Salon Français dans la galerie de l’hôtel Arawak. Depuis, je suis en pleine production de travaux car j’espère pouvoir participer au festival Cri de Femmes et même faire une exposition solo à la fin de l’année 2024.  

Aurélie Victoire-Célanie dans son atelier. Photo : Linsay Boraton

Comment décrirais-tu ton art ? 

Aurélie Victoire-Célanie : A vrai dire ma pratique est assez diverse. J’ai commencé en école d’art avec des installations et de l’objet. Je travaillais beaucoup avec de la récupération d’objets significatifs avec une symbolique, une sémantique particulière soit je transformais ou j’agençais de façon à évoquer une réflexion, une idée ou une histoire. Ensuite, je me suis déployé dans la confection d’objets du fait de mes études en Art Objet option bijoux. J’ai confectionné des objets à partir de métaux ou d’autres matières. C’était un peu plus délicat car, je devais d’abord imaginer puis créer la forme. Donc partir de rien pour avoir un bijou à la fin. Aujourd’hui, je suis en Guadeloupe, c’est un peu plus difficile de faire des installations ou de faire des objets ( bijoux) du coup, je me suis tourné vers la peinture, le dessin et l’illustration et je fais en sorte que les techniques que je maîtrise puissent servir à l’aboutissement des réflexions que je produis ou les idées qui me viennent. Je suis dans une pratique ou la technique sert le propos.  

D’où puises-tu tes idées pour créer tes oeuvres ? Qu’est-ce qui t’inspire le plus ? 

Aurélie Victoire-Célanie : Je suis porté sur la culture matérielle, à savoir, l’étude des objets dans les sociétés humaines comment ils influencent la société, comment ils interagissent avec nous, les humains. Je lis aussi beaucoup de romans et de livres d’histoire des Antilles ou de la Caraïbe. Je m’inspire beaucoup de nos cultures créoles, qu’elles soient francophones, anglophones ou hispanophones. J’ai des centres d’intérêt portés sur l’histoire, la sociologie et même la calligraphie. C’est donc tout cela qui me porte et m’inspire dans mon travail artistique.  

Aurélie Victoire-Célanie dans son atelier. Photo : Linsay Boraton

L’année 2024 vient de commencer, quelle sera ton actualité ? As-tu prévu une ou plusieurs expositions ? 

Aurélie Victoire-Célanie : En ce qui me concerne, l’année démarre sur les chapeaux roues comme dit l’expression. Je prépare une exposition au mois de Mars. Par la suite, j’accueillerai celle d’une artiste nommée Kitsimie qui est aussi programmée au Festival Cri de Femmes. Comme je le disais en début d’interview, cet espace est aussi bien mon lieu de travail et d’expression qu’un lieu d’accueillir pour les artistes pour leurs événements et d’autres manifestations culturelles. Je sais qu’au fur et à mesure le planning des expositions au studio va se remplir. De plus, je prépare également mon exposition solo vers la fin de l’année, mais avant je dois trouver un espace suffisamment grand.  

Où et comment pouvons-nous suivre ton travail artistique ? Es-tu sur les réseaux sociaux ?

Aurélie Victoire-Célanie : Oui, je suis effectivement disponible sur les réseaux sociaux notamment sur Instagram qui est ma principale vitrine. Vous me trouverez en tapant : aurelie.victoire.celanie . Mon atelier est aussi présent sur la plateforme : confluence-art-studio ainsi que sur Facebook : Confluence Studio.