Manuel Valls veut renouer le dialogue sans infantilisation des Outre-mer.

C’est dans un contexte de crise sociale, économique, démographique et internationale que Manuel Valls, Ministre des Outremer a fait sa visite officielle aux Antilles-Françaises. Une visite au pas de charge faite lors du week-end du vendredi 14 au mardi 18 mars 2025. Le Ministre s’est dit près à renouer la relation entre l’Hexagone et ses territoires ultramarins sans infantilisation. En Guadeloupe, il n’a pas maché ses mots quant à la situation sanitaire liée aux problèmes d’eau que subissent les Guadeloupéens(nes).

Crise Covid engendrant une crise sociale sans précédant en Guadeloupe, suivie de la crise électorale en Nouvelle-Calédonie et ses nombreuses destructions, sans oublier les émeutes contre la vie chère à la Martinique et le monopole Béké en marge des manifestations menées par le RPPRAC, le tout sous fond d’influence ( ingérence ) étrangère notamment celles de la Russie et l’Azerbaïdjan, disons-le depuis 2021 la relation entre la France Hexagonale et ses Outre-mer est au plus bas. Rétablir la confiance sera un long chemin de croix. Pourtant, c’est le défi que c’est fixé le nouveau Ministre des Outre-mer, Manuel Valls.

C’est dans ce contexte de crise sociale, économique, démographique et internationale que le Ministre a fait sa visite officielle aux Antilles-Françaises. Une visite au pas de charge le temps d’un week-end, du vendredi 14 au mardi 18 mars 2025. Sur place, à plusieurs reprises durant ses allocutions, il s’est dit près à renouer la relation ébranlée mais non rompue, le tout sans infantiliser la population ni les élus locaux. Une parole et des actes puisqu’à travers son marathon, il a rencontré non seulement les responsables politiques, les acteurs de la vie économique. L’ancien Premier Ministre a notamment rencontré les membres du RPPRAC évidemment sans caméras. Un pas en avant dans le respect de ceux qui luttent contre les injustices.

Une visite commencée dans les îles du Nord.

A Saint-Martin, Manuel Valls a visité plusieurs chantiers parmi lesquels la cité administrative et judiciaire qui jouxtera la préfecture. Près de 39 millions d’euros pour une présence renforcée et plus efficace des services de l’Etat sur place avec une livraison en fin d’année. De plus, le Ministre s’est rendu sur le chantier du collège 900 qui a du retard avec un surcoût d’une trentaine de millions de euros. Puis Manuel Valls a pris connaissance du plan de modernisation du tout nouveau STIS, le service territorial d’incendie et de secours avec un objectif de ne plus dépendre de la Guadeloupe.

Le ministre des Outre-mer a ensuite rendu une petite visite à la caserne de gendarmerie, toute proche, avant de prendre la direction de l’institut médico-social à Marigot avec là aussi pour objectif de ne plus compter sur les services de la Guadeloupe. Manuel Valls a conclu sa visite avec un entretien avec les élus, à la collectivité de Saint-Martin.

Après Saint-Martin, il est partit sur l’île d’en face : Saint-Barthélemy. Sur place, il a rencontré  Xavier Lédée, président de la collectivité de Saint-Barthélemy qui a su garder son siège malgré le vote de défiance de l’opposition locale puis il s’est entretenu avec eux pour faire le point sur la situation de l’île. Une situation économique plutôt positive contrairement à son île sœur et autres territoires ultramarins où l’économie est en berne.

 Il a poursuivi sa visite au Fort de la gendarmerie à Gustavia avant de visiter l’usine Paprec (usine de valorisation énergétique des déchets) et la caserne des pompiers.

Manuel Valls en Guadeloupe pour renouer le dialogue sans infantilisation.

La visite ministérielle s’est poursuivie en Guadeloupe le samedi après-midi. Dès son arrivée, le ministre a rencontré le président de la Région, Ary Chalus, avec lequel il s’est entretenu longuement sur les problèmes que traverse l’archipel guadeloupéen. Des problématiques d’ordre économique comme la dette de certaines collectivités, la vie chère ainsi que les chantiers en cours auxquels l’Etat et la principale collectivité sont associés. Autre sujet et non des moindres, la question de l’eau devenue une priorité tant pour les collectivités locales que pour la Préfecture qui pour rappel n’a pas de droit d’intervention sur ce sujet mais pourtant, elle accompagne financièrement les administrations en charge à reconstruire le réseau d’eau. Depuis des années, les Guadeloupéens vivent quotidiennement avec des Tours d’eau et c’est une situation inacceptable selon le Ministre qui a mis encore une fois les élus face à leur responsabilité quant à de sujet.

Après avoir rencontré le président de Région, Ary Chalus, le ministre des Outre-mer est allée à la rencontre, le samedi en fin de journée, à la résidence départementale du Gosier, pour une rencontre avec le président Guy Losbar. Parmi les sujets qui ont été abordés, les dossiers de la vie chère et de l’eau, mais aussi celui de la souveraineté alimentaire et de l’évolution institutionnelle qui est chère au Président du Département qui n’est autre que l’héritier de Dominique Larifla chantre de l’autonomie de la Guadeloupe.

Entre deux rencontres institutionnelles, Manuel Valls a pu rencontrer les jeunes du RSMA qui s’impose de plus en plus comme un rouage essentiel de l’employabilité des jeunes en Guadeloupe et même au delà. Au cours de son passage, il a pu aussi visiter le chantier de la future crèche du RSMA, qui doit accueillir ses premiers enfants en septembre 2026 et ainsi permettre « aux jeunes mamans, de venir suivre la formation sans avoir la contrainte de la garde de leur enfant ». Le Ministre a tenu à rappeler aux jeunes inscrits leur chance de pouvoir faire partie de ce service adapté propre aux Outre-mer. Toutefois, quant à son efficacité, la question peut être posée ? Vu les critiques qui émanent en coulisse tant des élèves apprenants que des formateurs ou des services d’insertion.

Le Dimanche matin, le Ministre avait rendez-vous à Basse-Terre pour l’inauguration de la Préfecture qui était en travaux de réhabilitation depuis des mois. Par la suite, il est allé à Vieux-fort, comme adjacente du chef lieu où il a découvert un pan de la culture guadeloupéenne, la broderie puis, il a inauguré  la nouvelle station d’épuration, visiter un barrage anti-sargasse sur une exploitation agricole et d’un atelier de transformation agroalimentaire ainsi que le chantier de construction de l’hôtel Royal Key Wellness Resort au Moule. Pour finir par une visite du Mémorial Acte aux côtés des dirigeants de la structure et de Victorin Lurel penseur de ce Centre des Mémoires au coeur de Pointe-à-Pitre.

Manuel Valls en visite officielle en Guadeloupe. Photo : ELMS Photography ( Emrick LEANDRE)

Point d’orgue de cette rencontre officielle, celle avec les principaux acteurs économiques de l’archipel au CWTC de Jarry. Nul n’ignore qu’aujourd’hui, la Guadeloupe, à l’image de l’Hexagone, traverses des temps difficiles. Les remous de la crise Covid-19 se font sentir. L’économie est en berne et son principal secteur le BTP a ralenti la cadence. Le tourisme autre levier économique connait lui aussi des perturbations liées à l’augmentation des billets d’avion, les problèmes d’eau que subissent les hôteliers et les propriétaires de Gîtes. L’aéroport Maryse Condé ( ancien Pôle Caraïbe) connaît une baisse de voyageurs.

Coupler à cela, la vie chère qui empêche tant aux Guadeloupéens qu’aux touristes de profiter pleinement des avantages qu’offre la Guadeloupe. L’heure est donc à la crise. L’Etat saint sauveur est attendu de tous. Sur ce point le Ministre l’a bien compris. Cependant, il a mis tout ce beau monde face à sa responsabilité. Il a rappelé que la question de l’Octroi de Mer est à la charge des élus qui eux tiennent à cette taxe locale qui  » permet de le fonctionnement des collectivités locales ». Dans une France en crise, l’heure est au serrage de la ceinture et le ministre a été clair, l’Etat ne pourra assumer que les dépenses en cours. En sommes, il faut faire des économies.

Manuel Valls en visite officielle en Guadeloupe. Photo : ELMS Photography ( Emrick LEANDRE)

Rencontre avec le RPRACC en Martinique :

En Guadeloupe, le Ministre a souligné l’intérêt du Gouvernement à lutter contre les économies parallèles liées au narcotrafic. En effet, depuis que l’axe Paris-Cayenne, Cayenne-Paris est surveillé par les services de police et de justice, les narcotrafiquants ont déplacé leur juteux commerce vers les Petits Antilles principalement la Martinique, la Guadeloupe et Saint-Martin. Dans la lignée de ces prédécesseurs, Manuel Valls a réitéré la volonté de l’Etat a lutter fermement contre ceux et celles qui s’adonnent à ce commerce illégal entraînant de l’insécurité quand on voit le nombre d’armes à feu en circulation tant en Guadeloupe que dans son île sœur, la Martinique, la situation est vraiment grave.

S’il y a bien une rencontre qui aura marqué, c’est bien entendu celle avec le RPPRAC, ( Rassemblement pour la protection des peuples et des ressources afro-caribéens) initiateur de la colère de la fin d’année 2024 contre la vie chère devenue en Martinique. La rencontre s’est faite à l’abri des caméras. Une rencontre informelle donc mais qui ouvre la voie au dialogue entre l’Etat et les représentants du mouvements citoyens qui ont été pendant plusieurs mois réprimés sans ménagement et dont les revendications ont été ignorées par l’ancien ministre des Outre-mer François-Noël Buffet. Homme de paix ou homme d’écoute, comme on le veut, Manuel Valls semble jouer la carte de l’apaisement à chaque territoire qu’il visite.

D’ailleurs, en Martinique, le Ministre a annoncé l’intention de porter un Projet de loi contre la vie chère dans les territoires ultramarins. Cette loi sera votée avant les grandes vacances 2025. Elle consistera à plus de transparence, plus de concurrence et à la transformation des économies ultramarines avant la diminution des monopoles voire des oligopoles.

Comme il a pu le faire avant son départ pour les Antilles-Françaises, Manuel Valls a encore appelé à plus de concurrence et à une plus grande transparence de la part de ces grands groupes économiques de la distribution alimentaire parmi lesquels GBH. Pour arriver à cet objectif, le Ministre veut notamment renforcer le rôle des OPMR ( Observatoires des Prix, des Marges et revenus),qui auront la capacité de pouvoir saisir directement la DGCCRF, la direction générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des fraudes. D’autre part, au cours de son discours, il a  souligné sa volonté de renforcer les sanctions contre les entreprises qui ne déposent pas leurs comptes mais aussi d’imposer la transparence sur les marges arrière.

Manuel Valls en visite officielle en Guadeloupe. Photo : ELMS Photography ( Emrick LEANDRE)

Des discours mais les attentes sont grandes :

On constate chez Manuel Valls, une volonté de faire le ménage pour calmer les colères des peuples mais sera t-elle suffisante quant on sait que les grands distributeurs, les békés ont des liens politiques profonds avec Paris et même jusqu’à Bruxelles ? Là aussi, l’heure est à l’observation.

Pour Elie Domota, leader du LKP de 2009, c’est insuffisant et les propos du Ministre ne sont que de la démagogie politicienne. Pour le syndicaliste, la véritable lutte contre la vie chère en Guadeloupe doit passer par l’application des Accords Bino signé avec le Gouvernement de l’époque qui s’était très vite désengagé. Selon l’ancien responsable de l’UGTG le vrai problème de la vie chère en Outremr, ce n’est pas l’Octroi de Mer, pas la TVA, pas les coûts du transport, ni les frais d’approche mais bien les marges exorbitantes que se permettent de faire les grands groupes békés. Elie Domota affirme même que le Bouclier Qualité Prix mis en place sur les cendres de l’accord Bino, a favorisé ces marges. Pour lui, les vrais gagnants des accords d’Octobre 2024 ou des mesures que prendra Mr Valls, sont toujours les patrons békés.

Au cours de son entretien avec RCI, Elie Domota a assuré que la baisse de la TVA à zéro ou encore la baisse de l’Octroi de mer à zéro sur les produits de première nécessité, financements perdus par les collectivités, est « répercutée sur d’autres produits (multimédia, vêtements, chaussures, livres d’école…).

De leur côté, les membres du RPPRAC qui ont pu le rencontrer, sont dans l’attente de mesures concrètes. . Pour Gwladys Roger, trésorière du RPPRAC, la prudence reste de mise :

Vous l’aurez compris, il s’agissait pour Manuel Valls de rétablir le dialogue avec ces peuples d’Outremer sans pour autant les infantiliser mais au delà des discours, les attentes sont grandes, il sera observé, jugé et attendu au tournant.

Le déplacement de Manuel Valls en Guadeloupe en photos :